Correspondance de P.J. Proudhon - Vol. 2 - 1875

.. 306 CORRESPONDANCE jugement étaient en lui choses identiques. Et quand je me trompe moi-même, j'en suis confus et je m'en accuse comme d'un crime. Quoi que je fasse, il m'est impos- sible de changer cette disposition d'esprit malheureuse. Sijevous ai bienjugé, citoyen Louis Blanc, le contraire 'a justement lieu pour vous. Vous êtes l'homme du senti- ment, de l'amour, de l'enthousiasme. Tandis que chez moi les passions viennent de la tête, chez vous les idées semblent toutes monter du cœur. Peut-être à nous deux ferions-nous un homme complet : mais, jus- qu'à ce que nous fassions un échange de nos qualités respectives, il est fatal que nous ne nous entendions pas; il est presque sûr que nous serons ennemis. Au fond, ce que je vous reproche, c'est précisément ce qui me manque et ce que je vous envie; en faveur du motif, vous oublierez quelques attaques qui ne peuvent vous faire valoir ni moins ~i plus. J·e suis las de faire la / guerre; j'aimerais mieux avoir à défendre; d'ailleurs, l'ennemi commun, ce n'est pas le gouvernement. Don- nez-moi du vôtre, et je vous donnerai du mien. C'est le seul moyen de nous estimer et de bien servir la Répu- blique. Dans cette réciprocité est tout mon secret pour la solution du problème social. Votre projet d'organiser des ateliers nationaux con- tient une pensée vraie, et que j'approuve, malgré mes critiques. Cette pensée, vous en avez vous-même conscience; mais il paraît que vous ne la regardez que comme secondaire, tandis qu'à mon avis elle est tout; je veux dire que sous le nom d'ateliers nationaux vous entendez des ateliersclefondatiow, des ateliers-principes, si je puis ainsi dire, car tous les ateliers sont nationaux, bien qu'ils restent et doivent toujours rester libres. Biblioteca Gino Bianco

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