Correspondance de P. J. Proudhon - Vol. 1 - 1875
SA VIE ET SON OEUVRE. XTII métaphysiciens, et après une journée de courses loin- taines, dans des rues sales, immondes, obstruées de J mille embarras, je me couche la tète vide et le corp~ fatigué, pour recommencer le jour d'après. Qu'est-ce qae ces courses? me demanderez-vous ?- Ces courses, mon ami, ce sont des visitcs, ce sont des sollicitations auprès de sots personnages; puis c'est l'entrainement de la curiosité qui m'a saisi, moi le moins curieux des etres animés: ce sont des musées, des bibliothèques, des as- semblées, des églises, des palais, des jardins, des théà- tres àvisiter. Je me suis éprisdepeinture,je me suis épris dc musique. je me suis épris de sculpture; tout cela est bel et bon, mais tout cela ne peut assouvir la faim, quand elle.me presse, ni ren1placer mes douces lectures de Bailly, d'Hume, de Tennemann, que je faisais au coin de mon feu quandje savais lire. Voilà mes jérémiades terminées. Ne les prenez pas - trop à la lettre et ne croyez pas que je cède à l'abat- tement ni au découragement; non, je suis fataliste et j'ai foi dans mon étoile. J e ne sais encore quelle est ma vocation, ni à quelle branche des lettres humaines je suis plus particulièrement propre; je ne sais méme si je suis et si je serai jamais propre à aucune; mais qu'importe : je souffre, je travaille, je réve, je jouis, je pense, et, tout résumé, quand sonnera ma dernière heure, j'aurai vécu ! Proudhon, je vous aime, je vous estime; ce ne sont pas des phrases que je vous fais là. Eh I dis-moi, pauvre ouvrier imprimeur, quel intérèt aurais-je à te flatter, à te caresser? Es-tu riche, pour payer des COllRJISP. I. b Biblioteca Gino Bianco
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