Pègaso - anno IV - n. 12 - dicembre 1932

652 C. Pellegrini mais contre moi. Maintenant je ne sais plus si nous nous reverrons jamais, et il y a sur mon ame un poids de souvenir•s qui ne me quittent pas un instant. Quelle fatalité que par la violence de la lutte, par le genre de moyens dont elle s'est servi, et par les bizarres défauts de mon étrange caractère, les esprits les plus faits l'un pour l'autre et qui se manqueront toujours l'un à l'autre, soient probablement à jamais séparés. Car je ne vois guère de possibilité de nous réunir. Elle s'est obstinement et séchement refusée à m'en faciliter les moyens indiqués convenients et signés autrefois par elle 1 ), et je suis tenté de croire qu'à l'exception de quelques retours subits et passagers, elle est plus disposée à, éviter qu'à désfrer ma présence. Hélas ! Je ne le lui reproche pas. Je lui ai fait beaucoup de mal, j'ai été inconcevablement dur. Elle avait l'air si puissant qu'on la combattait sans ménagements, et au fond de nos ames, ou du moins de la mienne, il y avait, il y a eucore un tel lien entre nous que j'étais obligé pour lui résister d'ètre d'autant plus violent que c'était une espèce de suicide. Je vous parle bien longuement, cher Simonde, d'une triste et irrépa– rable chose. Mais je ne puis en parler qu'à vous et il est dans ma de– stinée de ne jamais ouvrir la bouche sur la chose qui m'occupe jour et nuit, uniquem·ent, perpetnellement, exclusivement. Car son idée se mele à mon travail et souvent quand j'en suis content, je gémis de si bien. faire sans' pouvoir le lui montrer. Mais il est de mon devoir rigoureux de ne laisser voir à personne cette pa,rtie de moi mème, qui affligerait profondément et sans utilité une femmè 2 ) qui m' inspire un autre genre d'affection et une profonde reconnaissance. Il est impos.sible de concevoir plus de douceur, de bonté, de tendresse, de complaisance pour tous mes goùts, de menage- _ ments pour toutes mes bizarreries tristes et nombreuses, un désir plus constant et plus assidu de me voir heureux, un partage plus vrai de toutes les peines qu'ell~ remarque en moi, une occupation plus exclusive. (le tout ce qui peut me distraire ou parait me convenir. Lui montrer la seule chose sur laquelle elle ne puisse rien serait une cruauté gratuite, et j'ai fait assez de mal dans ma vie, j'ai vu couler assez de larmes, j'ai froissé assez de coe.urs qui m'aimaient, pour que ma funeste expérience m'ait donné le besoin de donner le bonheur que je ne pµis recevoir que bien imparfaitement, et que je mérite bien peu. Ceci entre nous, cher .Simonde. Encore une fois ce n'est qu'à vous que je parle, et l'abime ne s'ouvre que pour se hater de se refermer. Je ne vous demande qu'nne chose: c'est de me transmettre tout ce que vous saurez par Fanny, ou autrement, de notre arnie. Que je sache une fois et sa pos.ition, et surtout, s'il se peut, son arrivée heureuse et en siìreté. Je reste ici jusqu'à la fin de septembre. Vous aure~ clone bien le temps de me répondre. Mandez-moi ce que Fanny devient et si elle part ou reste et dites-lui de m'écrire. Apprenez-moi aussi si vous serez en– eore à Genève dans le mois d'octobre. Je voudrais bien vous y voir. 1 ) Si Yedano questi originali documenti nel citato volume: Lettres de Madamf' <le St<iel <ì B. Gonstant, p. 31 sgg. 2 ) La moglie, Carlotta von Hardenberg. BibliotecaGino Bianco

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