CONFLUENCES ET PARTICULARITES LATINO-AMERICAINES à se transformer, non plus que par une bourgeoisie naissante, limitée, donne motifs à l'extension des pouvoirs et prérogatives de l'Etat, avec l'augmentation corrélative de son budget et de sa masse de salariés de tous rangs. L'extension est notable dans le domaine économique, quand des crises secouent le monde et réduisent les mouvements d'exportation et d'importation au minimum, ou que les guerres cassent le commerce entre continents. La débacle de 1929, les guerres mondiales 14-18 et 39-45 vont faire des Etats non plus seulement des propriétaires, mais des entrepreneurs, des exploitants de leurs propriétés. Par des « corporations de développement » comme au Chili, par des initiatives répondant aux besoins de défense nationale comme en Argentine, suivant des vues géo-politiques comme au Brésil, secteurs civils et militaires de l'Etat créeront des industries, inventorieront les ressources en matiéres premières et les sources d'énergie, contròleront les changes et le commerce extérieur, s'efforceront d'harmoniser le développement industrie!, de planifier la progression. Pour le plus grand bénéfice des possédants certes. L'idée de propriété privée n'est pas mise en cause, elle est meme fréquemment exaltée. Et bien des industries privées ne devront leur essor qu'à l'existence d'une couteuse infrastructure mise en place par des organismes publics et payée par l'ensemble de la population. Il n'en reste pas moins que le pouvoir d'Etat n'est plus aisément manipulable, qu'il est devenu force autonome, meme s'il est sensible aux pressions des nantis et aux solidarités de pouvoir. Le haut personnel d'Etat, comme la bureaucratie qui en est la masse d'exécution, s'efforce, tendance naturelle de toute organisation, à fixer son existence et assurer sa sécurité, à échapper aux convulsions et aux servitudes du pouvoir politique, à apparaitre et agir comme une puissance permanente et une garante des intérets de l'ensemble de la nation. Il n'est pas sans intéret de relever que, dans les années 60 déjà, l'Etat, dans la plupart des pays d'Amérique latine, occupait une piace de choix dans la liste des propriétaires des entreprises nationales les plus importantes. Au Brésil, 44 sur les 100 premières, alors que ce pays est considéré comme le champion de la libre entreprise. Au total, les secteurs publics lanoamèricains détenaient 78,2% des dix premières entreprises, 68,1% des 20 premières; 62,4% des 30 premières. Et les nationalisations, depuis cette époque, n'ont fait que s'accroitre. Cet Etat n'est plus un instrument, meme s'il est encore 67
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