CONFLUENCES ET PARTICULARITES LATINO-AMERICAINES nal. A vrai dire un capitalisme qui n'embrasse pas, ni ne conquiert, l'ensemble des sociétés locales, mais conserve un caractère sectoriel. Il s'agit d'exporter des produits miniers, des matières premières, et d'importer des produits manufacturés. L'activité se concentre, demeure concentrée, dans les ports, le long des còtes. Elle ne modifie que fort peu l'intérieur. Suivant cette orientation, se fortifie une oligarchie composée de propriétaires terriens et miniers, de commerçants et de spéculateurs. Peu de capitalistes, au sens européen du terme. Ce sont le plus souvent, pour ne pas dire toujours, des entreprises étrangères qui installeront les chemins de fer et aménageront les ports, avec des systèmes de crédits et de prises de garantie qui en feront les co-propriétaires des grandes sources de richesses. Traditionnellement clone, et une étude comme celle de Marcello Carmignani sur le Chili (Sviluppo industriale e sottosviluppo economico - 1886/1920) l'illustre abondamment, il ne se présente qu'un capitalisme sui generis, simple partie prenante d'un complexe capitaliste international dont il dépend, et qui n'ambitionne pas d'utiliser l'ensemble des ressources, matérielles et humaines, de la totalité de la nation. L'Etat n'est, dans ces conditions, qu'un appareil peu couteux, un instrument de police, avec des administrations médiocres, et une armée peu dépensière qui permet, chichement, à quelques Métis ambitieux de s'ouvrir une carrière, en défendant le cas échéant les grandes familles qui se partagent le pouvoir. Les communautés indiennes, les populations des vallées et de l'altipiano, vivant en presque autarcie, se tiennent autant que possible à l'écart des organismes officiels, n'évoluent guère. Ce n'est que quand les problèmes des relations avec le monde extérieur prendront de nouvelles dimensions et exigeront de l'imagination, quand le lent développement industrie! secrètera un prolétariat urbain, quand !'oligarchie se trouvera obligée de céder quelques parcelles de son contròle politique, quand le magma de classes moyennes commencera à prendre conscience de son poids, que les services d'Etat s'étofferont. Plus tard encore, à l'esprit oligarchique qui se perpétue dans les sociétés en voie de modernisation, succèderont - rupture fondamentale - les notions d'une mobilisation de la nation toute entière, de la nécessaire machine d'organisation pour cette oeuvre, du ròle des catégories sociales qui en seront la matière vivante. 65
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