Interrogations - anno IV - n. 12 - ottobre 1977

MOUVEMENT ETUDIANT JAPONAIS lisme transformé. Elles répétaient des formules périmées (fonctions objectives des classes, paupérisation constante, crise économique imminente, etc.). Ces mots incantatoires n'avaient aucune signification pour les ouvriers plongés dans une situation neuve. Si elles avaient été capables d'analyse, les fractions auraient compris que le vrai problème était de rendre l'initiative aux ouvriers contre la société bureaucratique. Mais dans ce cas elles eussent dû admettre leur propre décomposition. Car la lutte pour la reprise de la spontanéité ouvrière s'oppose à la vieille conception d'avant-garde. La méconnaissance de la réalité sociale ne permit pas aux sectes de donner une orientation précise à leur volonté révolutionnaire, de définir leur action en fonction d'un long effort, mais leur fit accorder une importance essentielle à l'apparent extrêmisme militant. Elles critiquaient le stalinisme, mais en fait elles étaient de mentalité stalinienne. Elles se voulaient avant-gardes et méprisaient fondamentalement les « masses » populaires, Elles s'en tenaient au schéma de la transformation sociale par la prise du pouvoir et la promulgation de lois révolutionnaires; les masses devaient être menées par le « parti ». Elles n'avaient ni conscience que la révolution est affaire de tous, ni que les luttes doivent être menées de façon autonome, pour que le plus grand nombre participe à la transformation de la société. Elles étaient à la fois orgueilleuses de leur mission, et parfaitement anachroniques. Un troisième facteur explique la décadence: les haines entretenues par le dogmatisme, la haine comme sentiment moteur de l'action. Chaque militant était bardé de certitudes et détestait tout dissident, tout désaccord. D'où la haine contre les étudiants indifférents aux problèmes .iugés essentiels; la haine contre les étudiants qui pensaient à leur carrière, haine contre les travailleurs qui ne se soulevaient pas, haine contre les partis de gauche traditionnels: Parti socialiste et Parti communiste, haine contre les autres fractions idéologiquement opposées. Ce climat de haine a donné un caractère fermé aux luttes. Le militant ne cherchait pas à comprendre le voisin ni à entrer en communication avec lui. A partir de 1970, avec l'essoufflement du mouvement, les rivalités entre sectes ont pris un tour fratricide, surtout entre fractions trotzkystes. Enfin, il faut tenir compte du rejet des jeunes par les générations d'adultes, lesquelles avaient tendance à juger le mouvement étudiant comme une douteuse plaisanterie. Or, si le mouvement étudiant faisait face à des problèmes importants, 25

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