Le Contrat Social - anno XII - n. 4 - dicembre 1968

264 est mis sur le même plan, sans tenir co1npte d'aucune table des valeurs, et ce qui ne mérite qu'un rappel sommaire prend des proportions excessives, obscurcissant << la morale de !'·histoire>>. En revanche, l'auteur passe sous silence la plus éhontée des impostures d'après-guerre, la publication du faux rapport de l'amiral Fechteler par le Monde (10 mai 1952), journal qu'il tient naïvement pour << semi-officiel >>.Il se tait aussi, malheureusement, sur deux livres du vice-amiral Zacharias, à mettre dans le même sac. Mais on doit le louer pour les pages consacrées au sieur I<.enneth de Courcy, faussaire impudent qui a battu monnaie avec un Intelligence Digest bourré d'inventions plus ou moins fantastiques ou saugrenues, et qui purge actuellement une peine de sept ans de prison pour << fraude, faux et parjure>> (cet individu sans aveu a, pendant des années, embobiné des gens ignares de la << haute société >>, genre Otto de Habsbourg et autres altesses). Mais passons au chapitre 9, qui nous met en cause. * * * M. Blackstock y expose après nous la production d'une série incroyable de << forgeries >> dénoncées pendant des années dans le B.E.l.P.I. (Bulletin d'Etudes et d' Jnformations politiques internationales), devenu Est et Ouest depuis le n° 143 de 1956 à partir duquel les articles jusqu'alors anonymes ont été signés (ce serait trop long à expliquer, et d'ailleurs peu importe). Ici encore, il faut passer au mode personnel : j'ai écrit presque tous les articles sur les faux qui pullulaient alors, excepté précisément les deux que M. Blackstock m'attribue. L'un, d'un collaborateur occasionnel, actuellement non identifié, dont deux lignes malheureuses sont diamétralement contraires à mes vues; l'autre, de Branko Lazitch, avec qui j'étais et reste en complet accord. A la décharge de M. Blackstock, il faut supposer que ses connaissances en français sont insuffisantes à différencier les textes, tant le sens que le style, sans quoi il ne m'aurait pas fait l'injure de m'imputer les deux lignes qui contredisaient d'avance tous mes futurs articles (n° 22 du B.E.I.P.I., en 1950, alors que la rédaction de ce Bulletin n'avait pas encore son noyau stable). J'ai entrepris de mettre le public en garde au sujet des faux et des faussaires en question dès le n° 46, en 1951, par une brève allusion, puis de plus en plus explicitement à partir du n° 57 (une vingtaine d'articles). Mon attitude peut se résumer dans cette phrase typique : << On ne saurait s'abaisser à réfuter une chose aussi malpropre>>; (cf. B.E.I.P.I., n° 88.) M. Blackstock m'attribue non seulement la paternité des écrits d'autrui, mais même la direction ou la propriété d' Est et Ouest. Il ne fait là que répéter une invention de B. Nicolaïevski à laquelle j'ai dû opposer trente-six démentis catégoriques. Mais le << grand Boris >>, comme nous l'appelions, s'avérait alors têtu comme une mule et savait mieux que moi ce qu'il en était. Depuis la guerre, il avait beaucoup changé, avec l'âge, ne se rendait à aucun argument, allait jusqu'à nier l'évidence. Nous eûmes des discussions sans issue précisément à propos de ce gang démasqué par mes soins et BibliotecaGino Bianco PAGES RETROUVÉES dont j'écrivis plusieurs fois que les produits ne méritaient que d'être << jetés au panier >>. Vsiotaki, koié chto tam ièst' (malgré tout, il y a là quelque chose) s'obstinait-il à répondre, tandis qu'à mon avis, par exemple sur le faux Journal de Litvinov : << Point n'est besoin de l'ouvrir pour savoir qu'il n'y a pas un mot de vrai là-dedans >>.Quand Michel Koriakov analysa un des faux en détail, je l'approuvai chaudement tout en commentant : << C'est beaucoup trop d'honneur pour une chose aussi méprisable >>. On pourrait multiplier les citations de ce genre. Il va de soi qu'on ne saurait empêcher un faussaire d'utiliser ou de plagier un ouvrage existant pour se faciliter la besogne : de même que les Protocoles de Sion empruntent au Dialogue aux Enfers de Maurice Joly, les gangsters de plume se débrouillent en pillant d'autres textes, bons ou mauvais, mais cela ne rend pas leur camelote plus respectable. J'essayais de le faire comprendre à Nicolaïevski, lui disant : << Un morceau de pain blanc mis dans une poubelle devient aussi de l'ordure >>. En vain. En tout cas il est inadmissible de me prêter, comme le fait M. Blackstock (p. 174), la moindre concession au gang des faussaires. Lorsque Ryszard Wraga me fit part de sa conversation avec le meneur du gang qui ne se gêna pas pour lui confier : << Moi, j'écris des livres pour les idiots >>j,'insistai pour que notre ami polonais publie cet aveu dépourvu d'artifice, à des fins de salubrité publique, et de notre échange de vues résultèrent les deux articles parus dans le Dziennik Polski de Londres, reproduits dans le B.E.I.P.I. (n° 139), où << les idiots >>figurent en gros titre. Il ne s'agit donc pas d'une lettre du gangster principal, M. Blackstock se trompe encore ici, mais d'une conversation rapportée par R. Wraga dans l'un de ces articles. << Les idiots >>,ce sont tous ceux qui ont imprimé les faux et les ont souvent payés très cher. Ce sont aussi ceux que M. Blackstock honore du nom de << soviétologists >>,comme le charlatan stalino-trotskiste I. Deutscher capable de reprendre à son compte les plus grossiers mensonges tantôt d'un faussaire avéré, tantôt de la police stalinienne. Ne parlons pas du public ignorant et crédule. Nous ne commenterons uas davantage Agents of Deccit, notre intention étant surtout de donner ci-après, à titre documentaire, une sorte de mémorandum quasi inconnu, daté du 15 juillet 1955, et qui fut tiré à la ronéo par Esope à très peu d'exemplaires : ce qui précède lui tiendra lieu d'entrée en matière. Nous l'avons corsé de notes complémentaires qui contribueront à guider dans la documentation disponible ceux qui désirent en savoir davantage sur cette cynique et fructueuse entreprise, en travers de laquelle se sont mis bien peu de critiques, dans l'intérêt de la vérité com1ne de la résistance à l'intoxication stalino-communiste. Car les faussaires, ainsi que l'a remarqué Branko Lazitch, << observent une règle invariable : ne jamais attaquer l'Union soviétique et présenter obligatoirement les maîtres du Kremlin sous un jour sympathique et favorable>>. Nous avons également souligné cette tendance constante, réellement systématique. Et en outre il est certain que les saletés ainsi répandues

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