DOCUMENTS L'activité et les erreurs de R. Slansky et de ses èoaccusés auraient dû être élucidées à l'intérieur du Parti afin qu'il y soit mis un terme. Au lieu de quoi leur affaire fut, de manière injustifiable, examinée par la Sécurité d'Etat dont les suggestions et les conclusions furent acceptées sans discrimination par les dirigeants du Parti, Klement Gottwald en tête. Pareille attitude était en contradiction avec les structures du Parti et constituait une violation flagrante du droit socialiste par les organes de la Sécurité d'Etat et de la Justice. Une part -active dans les persécutions à l'intérieur du Parti fut également prise par allusion à cette méthode, quoiqu'il en rejette carrément la responsabilité sur les forces de sécurité. Des preuves abondantes, nous l'avons vu, démontrent cependant que le travail de la police était supervisé dans tous ses détails par les dirigeants du Parti. Le document passe également sous silence le fait bien établi que les victimes étaient soigneusement choisies à l'avance (origine juive, activité dans diverses branches de la vie politique et économique, etc.), afin de satisfaire deux conditions. Tout d'abord, il fallait que les procès tchèques soient l'exacte reproduction des précédents procès d'épuration en Union soviétique et dans les autres « démocraties populaires•; ensuite, il importait de prouver au peuple que les difficultés de l'économie tchécoslovaque avaient directement leur source dans le sabotage économique à grande échelle auquel la plupart des accusés étaient censés se livrer. La campagne antisémite (évoquée de façon fugitive dans le document, mais qui en réalité prit des proportions hystériques dans la presse, à la radio et par le moyen de réunions publiques telles qu'on n'en avait pas vu depuis Gœbbels) constituait un élément important du plan. Le but était de convaincre la population qu'un groupe de puissants conspirateurs juifs, sans racines dans le pays et dans le peuple, avait dérobé à la nation les fruits de son travail honnête en faveur des sionistes du monde entier. 11. Directive intéressante et qui montre que les tribunaux tchécoslovaques, dans la pratique, sont encore sous les •ordres du Parti. Si c'est le Parti qui, au début des années 50, ordonna à la Cour suprême de commettre des assassinats et autres crimes judiciaires, quelque dix ans plus tard il enjoignit à la même cour de déclarer ces mêmes crimes nuls et non avenus. Tout cela constituait et constitue une violation de la Constitution. On peut alors se demander si, au moins, ceux qui sont responsables de ces crimes ont été vraiment punis. La réponse, partiellement fournie par le document, est claire : les exécutants, principalement des fonctionnaires subalternes de la police de sécurité, furent jugés et condamnés; ceux qui avaient donné les ordres sont demeurés impunis ou, au pire, ont été révoqués de leurs fonctions dans le Parti et au gouvernement, tout en restant souvent membres du Parti, députés, voire membres du Comité central. J. Urvalek, l'odieux procureur général dans le principal procès Slansky-Clementis, resta président de la Cour suprême pendant les dix années qui suivirent les assassinats judiciaires, et il fut même réélu à ce poste en 1962. Un mois seulement avant la session du Comité central au cours de laquelle les réhabilitations devaient être discutées, Urvalek demanda sa retraite pour pouvoir se consacrer à des • études de droit •· Une réception fut donnée en son honneur à Prague le 8 mars 1963. Le lecteur sera frappé par le curieux mélange d'actes criminels et politiques, fictifs ou réels, que des communistes étaient censés avoir commis, ou bien qu'ils n'avaient pas commis, à un moment ou à un autre. D'un point de vue Juridique, il est évident que la pleine réhablJitation des personnes exécutées sur de fausses accusations a été acquise après leur mort. De plus, tels actes, telles vues attribués aux victimes des erreurs Judiciaires, aujourd'hui considérés comme erronés, furent à l'époque tenus pour hautement méritoires, exemplaires, tout à fait dans la ligne de la politique 1uivie alors par le Parti. Cette contradiction, qui re110rt du document, se fit sentir dès l'approbation du texte en avril 1963. Plusieurs communistes slovaques, à qui on refusa de rendre leur place au Comité central lors de cette 1es■ion spéciale, durent être réintégrés six mets après aeulement. Biblioteca Gino Bianco 239 divers fonctionnaires du Comité central dont Rudolf Slansky était, jusqu'en septembre 1951, directement responsable. Le service des preuves, pendant un certain temps le service du personnel et avant tout la Commission de contrôle accumulèrent les déclarations les plus variées, les plus fausses, les plus dérisoires contre des fonctionnaires du Parti, puis les transmirent aux organes de sécurité. Une lourde responsabilité dans l'atmosphère de méfiance, de suspicion et de crainte incombe au travail de la commission du présidium du Comité central du P.C. tchécoslovaque, composée de V. Kopecky, G. Bares et B. Kôhler, organisme qui examina l'affaire Svermova. Cette commission se fondait sur des notions insoutenables de sécurité, elle confondait la procédure d'enquête de sécurité concernant le Parti et celle concernant l'Etat; son rapport à la réunion du Comité central tenue les 21-24 février 1951 constituait un tableau si déformé que les personnes incriminées furent aussitôt dénoncées moralement et politiquement. Au cours de la même session, Stefan Bastovansky présenta au Comité central un compte rendu entièrement irresponsable de la prétendue trahison de G. Husak, L. Novomesky et autres. Plusieurs délits concernant uniquement le Parti furent grossièrement déformées pour les faire apparaître comme une activité répréhensible. De nouvelles enquêtes ont toutefois révélé que plusieurs des accusés étaient politiquement responsables d'un certain nombre de fautes et d'erreurs graves. Des méthodes bureaucratiques, autoritaires et formalistes ont été introduites dans la vie du Parti. Les liens du Parti avec la classe laborieuse ont été affaiblis; ses activités, ses initiatives ont atteint le point mort. Les accusés ont pris une part active à la création du culte de la personnalité. Ils ont toléré dans l'appareil des éléments ayant peu de choses en commun avec le Parti ou les travailleurs. Le terrain avait été préparé pour que fleurissent l'arrivisme, la fourberie, l'opportunisme et l'indifférence politique. Il est devenu clair que Slansky a pris part à de grossières violations des principes léninistes concernant le travail des cadres et qu'il a servi de prototype à ceux qui ont utilisé des méthodes et formes d'action incorrectes durant la période du culte de la personnalité, tant dans l'appareil du Parti que dans celui de l'Etat, et spécialement dans le domaine de la sécurité publique. Les erreurs et les manquements de Slansky procédaient de sa vanité, de son sentiment de supériorité et de son arrivisme. En 1949-50, avec d'autres fonctionnaires, ses collaborateurs, il mjt en branle la machin
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