Le Contrat Social - anno X - n. 5 - set.-ott. 1966

LE CONTRAT SOCIAL concluait les démarches de M. Jean Letourneau à Washington et les discussions avec les représentants de la France, du Vietnam et du Cambodge en reconnaissant que« la lutte dans laquelle les forces de l'Union française et des Etats associés sont engagées contre l'agression communiste en Indochine est une part intégrale de la résistance mondiale des nations libres aux tentatives communistes de conquête et de subversion»; aussi les Etats-Unis s'engageaient-ils à « prendre des mesures pour accroître leur aide à l'Union française». Le 17 décembre 1952, le Conseil de l'AtlantiqueNord, à Paris, adoptait une résolution de soutenir pleinement la France dans sa campagne d'Indochine. L'année suivante, le 30 septembre, la France obtenait une aide américaine supplémentaire valant 385 millions de dollars « pour empêcher l'Asie du Sud-Est d'être submergée par les forces du communisme international». Mais le 7 mai 1954, Dien Bien Phu tombe aux mains du Vietminh, la menace d'invasion chinoise se précise, les accords de Genève mettent fin (le 20 juillet) aux hostilités, une ligne de démarcation tracée au 17e parallèle sépare le Nord et le Sud, des« élections libres» doivent avoir lieu le 20 juillet 1956. La délégation vietnamienne proteste énergiquement le 21 juillet 1954 contre les accords, qu'elle refuse de signer, car elle n'accepte pas la division factice du territoire, elle propose un contrôle du rétablissement de l'ordre par les Nations Unies et réprouve les avantages excessüs accordés par les Français aux communistes. Le 18 juillet, le général Walter Bedell Smith, au nom des Etats-Unis, avait décliné d'approuver les accords, tout en annonçant une prochaine déclaration unilatérale précisant l'attitude américaine, qu'il fit le 21 juillet d'abord en ces termes : « Comme je l'ai dit le 18 juillet, mon gouvernement n'est pas disposé à se joindre à la déclaration de la Conférence telle qu'elle est soumise»; après quoi le porte-parole américain réitérait la position traditionnelle de son pays en accord avec les principes des Nations Unies, et il soulignait que son gouvernement « regarderait tout renouvellement de l'agression violant les accords sus-indiqués avec un grave souci et comme menaçant sérieusement la paix internationale et la sécurité». (Il nous faut abréger autant que possible; l'essentiel y est.) Le 8 septembre 1954, la France, les EtatsUnis, la Grande-Bretagne, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Pakistan, la Thaïlande et les Philippines concluaient le traité de défense collective de l'Asie du Sud-Est (dit : pacte du Pacifique), signé par Guy La èhambre au nom de la France. En arplication de ce traité, un communiqué officie franco-américain du 29 septembre 1954, concluant des négociations menées par Guy La Chambre et Edgar Faure Biblioteca Gino Bianco 317 au nom de la France, exprimait la solidarité des deux pays pour « assister le Cambodge, le Laos et le Vietnam dans leurs efforts tendant à sauvegarder leur liberté et leur indépendance», et notamment pour aider le Vietnam à réinstaller dans le Sud les Vietnamiens qui fuyaient la terreur communiste du Nord, au nombre de 300._000 alors (ils seront bientôt un million). Les Etats-Unis s'engageaient à financer le corps expéditionnaire français, en plus de leur aide matérielle aux trois Etats indochinois. Le terrorisme et les persécutions dans le Nord, spécialement contre les catholiques, et l'exode en masse des habitants vers le Sud, allaient inciter le gouvernement vietnamien à demander une aide accrue aux Etats-Unis, accordée par Eisenhower dans son message du 23 octobre 1954. A partir de là, une aide directe de plus en plus importante, annoncée par le State Department le 31 décembre 1954, sera fournie au Vietnam, au Cambodge et au Laos, cependant que l' agression directe des communistes au Vietnam exigera des Etats-Unis, sur tous les plans, une intervention toujours plus active. Telles sont les origines de l'engrenage où les Américains se sont trouvés à leur corps défendant engagés dans une partie où les techniciens et spécialistes devaient fatalement suivre les dollars et le matériel, puis les conseillers militaires, puis les cadres et les troupes, pour faire honneur à la signature de l'Oncle Sam. Tout cela, en commun accord avec la France, tant que le respect des traités et la fidélité aux principes demeuraient une préoccupation commune. Il est clair que les accords de Genève étaient inapplicables, faute d'une autorité effective pour en assurer l'application, entre autres pour réaliser la consultation électorale de 1956 avec les garanties indispensables. Le gouvernement légal du Vietnam et les EtatsUnis ont eu certainement raison de ne pas y souscrire, prévoyant les conséquences funestes de la division arbitraire du pays en deux zones et l'inévitable action criminelle des communistes. Ils voulaient que la mise en œuvre des accords soit confiée aux Nations Unies, non pas à une « Commission de contrôle» formée par un Polonais, un Indien et un Canadien, impuissante ou complice des communistes. Peut-être que l'O.N.U. n'eût guère été plus efficace : tout eût dépendu du choix de ses délégués et des moyens mis à leur disposition. En tout cas, parler maintenant d'un retour pur et simple aux accords de Genève est une dér1sion puisque les malheurs actuels du Vietnam en découlent. Ce serait folie que de recommencer sans garanties effectives imposant le respect de ces fameux accords. Ce qui précède ne retrace succinctement quc la genèse schématisée de l'engagement des Etats-Unis dans la guerre actuelle. Il y aurait lieu d'en compléter et prolonger l'exposé par

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