Le Contrat Social - anno X - n. 5 - set.-ott. 1966

308 plus possible dans la conjoncture sociale qui · est celle de !'U.R.S.S. après Staline : la consommation ne peut pas être réduite, comme il y a une dizaine d'années, ce qui empêche l'augmentation du taux d'accumulation. Reste à savoir - et c'est le dernier point - dans quelle mesure la remise en ordre de la planification et de l'organisation industrielle pourra faire appel à de nouvelles possibilités d'accroissement de productivité. Les changements, les perfectionnements de l'organisation ne sont-ils pas à l'origine du progrès des industries modernes? En France, on a dit quel'« investissement » est la politique des gens qui n'ont pas d'imagination ; c'est la solution facile; les vrais facteurs de productivité et de dynamisme dans les économies qui ont atteint un certain stade de maturité sont beaucoup moins les investissements que les progrès de l'organisation des entreprises. Un exemple concret : la France a doublé son trafic ferroviaire durant les années d'après guerre en utilisant la moitié seulement des cheminots employés auparavant, cela grâce à une meilleure organisation. L'Union soviétique est en train de prendre ce chemin, aussi bien dans le domaine de la planification (perfectionnement des techniques mathématiques) que dans celui de l'organisation des entreprises (perfectionnement des indicateurs économiques pour apprécier le travail de l'entreprise - c'est toute la réforme de Liberman, aujourd'hui bien connue - et institution de relations directes entre l'industrie et le commerce). Cette dernière expérience porte actuellement sur 25 % des entreprises de l'industrie légère pour lesquelles le plan ne fixe aucqn objectif de production ; ce sont les magasins qui, par contact direct avec les producteurs, Biblioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE décident de l'assortiment, de la qualité, voire des prix. Nous avons là une expérience d'économie de marché qui, bien que de proportions restreintes, montre que !'U.R.S.S. s'achemine lentement vers des formules assez proches de celles qui ont cours dans les économies occidentales. Il existe aussi des « inconnues » dans cette croissance, en particulier l'innovation : il est difficile de savoir quel sera le rythme des pro:- grès scientifiques et techniques. Ce qui est certain, c'est que l'économie soviétique paraît mieux armée que les économies occidentales pour planifier la recherche et qu 'éll~ dispose de spécialistes plus nombreux ; atouts importants dont il èst a priori difficile· d'apprécier les effets. On serait tenté de conclure que l'Union soviétique s'achemine vers des techniques d'organisation directement empruntées à l'Occident, comme les « firmes » -dans l'industrie, peut-être même vers des techniques de planification plus souples. Cette convergence pourrait inciter à penser que finalement, à un certain niveau de développement, les méthodes sont assez voisines, quel que soit le régime politique. Faut-il aller plus loin et dire que de nouvelles méthodes d'organisation pourraient modifier le régime ? Il appartient aux sociologues et aux spécialistes de la science politique d'indiquer les relations qui peuvent s'établir, dans les sociétés modernes, entre les différents types d'organisation économique et les régimes politiques. C'est un domaine peu exploré et sur lequel l'économiste a encore beaucoup à · apprendre. .. BASILE KERBLAY . , .

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