Le Contrat Social - anno X - n. 2 - mar.-apr. 1966

E. DEL/MARS socialistes-révolutionnaires à l'étranger, et, en collaboration avec G. A. Guerchouni, fusionna cette Union avec deux autres unions similaires, celle du Nord et celle du Sud, implantées en territoire russe. De là naquit le parti socialiste-révolutionnaire qui par la suite commit de nombreux attentats contre des personnalités du gouvernement et de l'administration tsaristes. Azev avait plus ou moins directement participé aux premiers attentats perpétrés par le groupe terroriste formé par Guerchouni. Ce groupe, baptisé plus tard « Organisation de combat du parti socialiste-révolutionnaire », ne comprenait à ses débuts qu'une poignée de combattants prêts à sacrifier leur vie. Il était très actif : le 14 février 1901, assassinat de Bogolépov, ministre de !'Instruction publique ; le 2 mars 1902, assassinat de Sipiaguine, ministre de l'Intérieur ; cette même année, attentat contre le prince Obolenski ; le 6 mai 1906, assassinat du général N. M. Bogdanovitch, gouverneur d'Oufa, etc. Azev se gardait bien de prévenir la police en temps utile de tous ces complots. D'accord avec l'Okhrana, il se consacrait à gagner la confiance du Comité central de son parti, se bornant à dénoncer des socialistes-révolutionnaires qui ne faisaient pas partie de l'Organisation de combat. C'est ainsi qu'il livra à la police le congrès clandestin du parti réuni en 1901 à Kharkov. Le 13 mai 1903, la police réussit à capturer Guerchouni. Azev, sous le pseudonyme d'Ivan Ivanovitch, devint le chef de l'Organisation de combat. Il menait un double jeu très subtil, astucieux. à la fois à l'égard de l'Okhrana et du parti. Il savait admirablement exploiter les intrigues et les rivalités entre les divers chefs de la police et le ministre de l'Intérieur. Ce qui lui permit de préparer sans encombre un attentat contre Plehve, ministre de l'Intérieur, détesté par ses subordonnés. Le 15 juillet 1904, Plehve fut déchiqueté par une bombe lancée par S. E. Sazonov. Cet exploit accrut énormément l'autorité et le prestige d' Azev dans son parti. Trois nouveaux attentats furent préparés : contre le général Trépov, alors chef de la police de Moscou, contre le grand-duc Serge Alexandrovitch, général-gouverneur de cette même ville, et contre Kleihels, général-gouverneur de Kiev. Seul, le grand-duc Serge fut tué en février 1905 par la bombe de I. Kaliaev, Azev ayant adroitement saboté les deux autres attentats. En 1906, Azev fit avorter les attentats contre Dournovo, ministre de l'Intérieur, contre l'amiral Doubassov, qui avait réprimé sans merci la révolution de Biblioteca Gino Bianco , 69 1905, a1ns1 que contre Stolypine, successeur de Dournovo au ministère de l'Intérieur. Le développement de petites organisations terroristes locales, de plus en plus nombreuses, qui échappaient à l'emprise d'Azev, les échecs répétés d'attentats organisés par lui, sapèrent peu à peu son autorité. De plus, les meilleurs terroristes disparaissaient l'un après l'autre, victimes de leurs propres engins, des gibets ou des bagnes tsaristes. En même temps, l'activité provocatrice de l'Okhrana était entrelacée si étroitement avec l'activité terroriste réelle du parti socialiste-révolutionnaire qu'il était souvent impossible de discerner où finissait l'une et où commençait l'autre. Par ordre du parti, plusieurs révolutionnaires servaient même dans l'Okhrana. Tout cela permit à Bourtsev, publiciste libéral émigré, de dévoiler dans son journal en 1908 le véritable rôle d'Azev. Ce qui mit fin à la carrière de ce maître provocateur. Réfugié à Berlin et nanti, par les soins de l'ambassade de Russie, d'un faux passeport au nom de Neumeyer, Azev échappa à la vindicte des révolutionnaires. Il mourut tranquillement à l'hôpital, en 1918. Bourtsev avait également réussi à prouver, en 1909, que Arcady Harting, depuis 1905 chef de tous les émissaires de l'Okhrana en Europe, installé à Paris, n'était autre que Abram Heckelman, alias Landeisen, qui était entré au service de la police tsariste alors qu'il faisait ses études à Saint-Pétersbourg. Soupçonné par ses camarades, il s'installa à Dorpat, où en 1885 il livra à la police u_ne imprimerie clandestine de la « Volonté du peuple ». Par la suite, il émigra et s'installa à Paris sous le nom de Landeisen. Là, il gagna l'amitié d'un vieux membre de ce parti, Alexis Bach, spécialiste de chimie appliquée et collaborateur de Paul Schutzenberger, professeur au Collège de France. Par ordre de Ratchkovski, son chef direct à l'Okhrana, Landeisen, mettant à profit les connaissances de Bach, forma un groupe d'émigrés russes et monta un atelier clandestin de fabrication de bombes, prétendument destinées à un attentat contre le tsar Alexandre III. Cette entreprise de provocation se termina par un procès sensationnel à Paris. Landeisen, qui s'était mis à l'abri en Belgique, fut condamné par contumace à cinq années de prison. Plus tard, Harting fut chargé de la protection de la famille impériale pendant ses voyages en Europe. De 1900 à 190 5, il commanda tous les agents russes de renseignements politiques à Berlin et revint à Paris en 1905. Après les révélations de Bourtsev, Harting dut

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