Le Contrat Social - anno IX - n. 2 - mar.-apr. 1965

revue l,istorÎIJUe et critique Jes faits et Jes iJée1 Mars-Avril 1965 Tr. l IX N 2 vO • , o LE MOUJIK ET LE COMMISSAIRE par B. Souvarine L E COMITÉCENTRAdLu parti communiste de_,l'U .R.~.S. a ten1;1 fin mars, pour la n-ieme fois, une session consacrée à l'état de l'agriculture collective dite « socialiste » et systématiquement vantée comme étant « la plus mécanisée du ~onde». On ne compte plus le nombre de sessions et de séances ainsi réunies en haut lieu à Moscou pour tenter de pallier les déficiences des kolkhozes et des sovkhozes. Il semble que, cette fois, les dirigeants aient délibéré en présence des seuls 330 membres et suppléants ~e cette Chambre oligarchique, alors qu'ils allaient Jusqu'à convoquer naguère deux et trois mille figurants pour faire valoir devant eux la science agronomique de Khrouchtchev. De session en session du Comité central, sans parler des réunions constantes du Secrétariat et du Présidium la situation de l'agriculture bureaucratisée n'a' fait qu'emp!rer, le marasme atteignant en 1963 des proportions impossibles à dissimuler puisqu'il ~vait alors fallu acheter à l'étranger quelque 12 millions de tonnes de céréales « capitalistes » pour c<;>uv~liers besoins essentiels du pays. Il n'est pas difficile de comprendre, même sans information o~ciell~, que le_dé~cit de la récolte en 1963 a neces~ai!ement impliqué un abattage en masse du betad, faute de fourrage pour le nourrir d'où pé~urie de viande et de laitages dans les ;nnées suivantes. Malgré d'excellentes conditions météorologiques en 1964, il s'avéra que de nouveaux achats de céréales au-dehors étaient encore nécessaires et que par conséquent des réformes radicales dev~~ent indispensables pour que l'Union soviétique ne reste pas dans la dépendance des pa~s capitalistes en matière d'alimentation primaire. Des mesures d'urgence furent décrétées dans le sens de concessions au secteur agricole Biblioteca Gino Bianco privé aussitôt après la session du Comité central d'octobre dernier, préludant aux décisions récentes de mars dont l'ampleur et la portée dépassent toute attente. En effet, il appert du rapport de Brejnev présenté le 24 mars et publié le 27 que « des erreurs gros~ières ont été commises [par qui?] dans la gestion de l'agriculture [depuis bientôt un demisiècle?] et c'est pourquoi la question de mesures urgentes à prendre est soumise au Comité central ». Critiquant les pratiques de gestion bureaucr~tique. et les iIJ?-provis~tionsfâcheuses qui nuisent a la production agricole, comme l'avaient toujours, {ait avant lui les premiers responsables de cet et,t des choses, Brejnev a préconisé de me~re ~n au « subjectivisme » ( ?) dans la direction de 1agriculture et de « recourir à des stimulants économiques et moraux » (sic) dans « tous les domaines de l'activité des kolkhozes et des sovkhozes », d'élargir « la responsabilité des dirigeants et des spécialistes », autrement dit de renoncer en grande partie aux rigueurs de la planification étatique, d'accorder de plus larges rétributions aux travailleurs, de plus larges possibi~ités~'i~itiative_aux cadres locaux, de plus larges hbertes economiques à tous. Cela se traduit concrètement, sur le papier, par l'annulation des dettes kolkhoziennes à l'Etat, par une forte réduction des livraisons obligatoires et une énorme augmentation des prix d'achat officiels de la production agricole. Il s'agit donc d'une sorte de nep aux conséquences incalculables, un tiers de siècle après la suppression par Staline de la nep de Lénme. Pour motiver des résolutions d'une telle envergure, Brejnev a dft révéler quelques vérités sur

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