Le Contrat Social - anno VIII - n. 5 - set.-ott. 1964

302 cause. Le climat, dans les milieux universitaires et intellectuels, était souvent fait d'impatience devant la lenteur et la lourdeur apparentes du gouvernement du Kuomintang, et de sympathie à l'égard des communistes, qui donnaient des explications simplifiées des problèmes chinois et promettaient des solutions rapides. Conceptions communistes LORSQU'ILPRITLE POUVOIRle, parti communiste chinois ne savait comment diriger le vaste système d'enseignement déjà existant et il n'était pas très avancé en matière de théorie pédagogique. Mais, fermement convaincus que connaissance et théorie découlent de la pratique, les dirigeants décidèrent d'appliquer certains principes fondamentaux du marxisme-léninisme aux problèmes· de l'enseignement afin de déterminer les grandes lignes d'une politique générale. Un de leurs postulats était que. l'enseignement et· la culture, en tant qu'éléments de la «superstructure » de la société, sont de simples reflets de la base politico-économique et servent les intérêts de la classe dominante. L'éducation pour l'éducation, ou pour l'individu, fut rejetée comme une conception naïve ; dans une société prolétarienne, l'enseignement doit servir le prolétariat. En qualité de membre du Comité central, Lin Feng a exposé cette thèse, en juin 1960, dans un discours prononcé lors d'une conférence de militants du Parti s'occupant de questions d'enseignement et de culture: Les entreprises de notre pays dans le domaine de la culture et de l'enseignement (...) sont les instruments de la dictature politique du prolétariat pour instruire le peuple dans l'idéologie communiste 2 • Outre l'éducation politique, le seul genre d'enseignement qui se justifie aux yeux des Chinois est l'éducation en vue de la production (la formation pour un métier déterminé). Il s'ensuit que le but de l'éducation est de former des individus qui, pour reprendre le slogan courant, soient « à la fois des .communistes et des experts», c'est-à-dire qui possèdent à la fois une «conscience» politique hautement développée et des connaissances ou des qualifications qui soient utiles au pays. L'objectif à longue échéance est de créer une classe d' «intellectuels-travailleurs», autrement dit des ouvriers et des paysans instruits et totalement libérés de l'esprit bourgeois. Mais, en attendant, le régime se rend compte qu'il a encore besoin des compétences de l' «ancienne » intelligentsia, qu'il doit consacrer une énergie considérable à transformer ces individus en alliés A surs. Dès l'installation du nouveau régime, les communistes chinois étaient très pressés d'atteindre ces buts. Ils voulaient pousser l'endoctrinement politique aussi vite que possible et former rapi2. Quotidien du peuple, 2 juin 1960. Bibl-ioteca Gino Bianco L'EXPÉRIENCE COMMUNISTE dement les spécialistes nécessaires aux ambitieux projets du régime visant à transformer la Chine en un Etat industriel moderne. Pour faire vite, ils décidèrent d'employer simultanément différents moyens : enseignement à plein temps, enseignement à temps partiel, enseignement en dehors des heures de travail. Dans sa forme la plus récente, cette politique a souligné l'importance qu'il y avait à favoriser la création et la gestion d'écoles par les usines et par des collectivités comme les «communes », en plus des établissements scolaires administrés par l'Etat. Avant tout, les communistes chinois ont toujours soutenu que l'enseignement doit être fermement tenu en main par le Parti. Le ministre de l'instruction publique, Yang Hsiu-feng a écrit dans un article publié à l'occasion du dixième anniversaire du régime : . Nous considérons que l'enseignement politique de l'idéologie marxiste-léniniste et des tâches politiques du Parti doit être le fondement de tout travail dans les écoles 3 • Le régime _estimeque c'est seulement grâce à la surveillance étroite exercée par le Parti que l'enseignement scolaire lui permettra d'atteindre ses buts politiques. Les éléments fondamentaux de la politique chinoise en matière d'enseignement - le double objectif d'avoir des «communistes» et des «experts», l'emploi simultané de moyens divers, et l'importance accordée à la surveillance étroite exercée par le Parti - n'ont pas varié pendant les quinze dernières années. Il y a eu tout au plus, à l'occasion, des changements de tactique sur la manière plus ou moins directe que devait utiliser le Parti pour exercer sa surveillance. Premières réformes PENDANTses quatre premières années d'exercice, le régime se consacra essentiellement, dans le domaine de l'enseignement, à deux tâches : réorienter et réorganiser. Des débats politiques et des cours de politique furent introduits à tous les échelons du système scolaire. Les enseignants et les étudiants les plus anciens furent soumis à un ·«remoulage idéologique» intensif pour garantir la «justesse » de leurs opinions politiques. Des pédagogues russes et des conseillers russes en matière d'enseignement arrivèrent en nombre croissant alors que des étudiants chinois se rendaient en U.R.S.S. pour se former. Les ouvrages soviétiques d'enseignement furent traduits en chinois pour pouvoir être employés dans les écoles chinoises. Deux années passèrent avant que le régime fît connaître ses directives pour un nouveau système scolaire 4 • La structure de l'enseignement 3. Ibid., 8 oct. 1959. 4. Communiqué de l'agence Chine nouvelle, Pékin, 1er oct. 1951.

RkJQdWJsaXNoZXIy MTExMDY2NQ==