Supplemento a Contrat Social - anno VII - n. 1 - gen.-feb. 1963

' ' PRODUCTIVITÉS COMPARÉES d'après Colin Clark (adaptation de Paul Barton) • Supplémenat u " Contrat social " Janv.-Fév1. 963.. Vol. VII, N° 1 Biblioteca Gino Bianco . . r ,

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PRODUCTIVITÉS COMP AR]jES d'après Colin Clark (adaptation de Paul Barton) I. - Introduction LA CROISSANéCcEonomique de l'Union soviétique hante les esprits. Le slogan selon lequel ce pays serait sur le point de « rattraper et dépasser» l'Occident a trouvé un écho extraordinaire. Les gens qui aident les maîtres de la Russie à le répandre ne se comptent plus. Les uns agissent ainsi dans l'intention de saper la résistance au totalitarisme. Les autres, au contraire, se proposent de mettre l'Occident en garde ; l'effet est à peu près le même dans les deux cas. L'enjeu de cette campagne s'est d'ailleurs considérablement accru avec les efforts du « tiers monde » pour surmonter un retard économique séculaire : il s'agit de convaincre·ces pays jusqu'à présent déshérités que, pour atteindre rapidement l!ur objectif, ils n'ont qu'à s'engager sur le chemin tracé par les fameux plans quinquennaux ; il s'agit de les pousser à rejeter la liberté avant qu'ils n'aient trouvé les moyens d'en jouir. Chose étrange, le slogan résiste à l'épreuve des faits. Mis en circulation il y a plus de trente ans, il a été démenti par le temps même 'lui s'est écoulé sans que l'événement se produisit. Bien plus, périodiquement remis en circulation, il est chaque fois accueilli comme une révélation... On pourrait chercher dans la sociologie et la psycholope une explication au comportement des journalistes, des professeurs et des hommes politiques qui le répandent, ainsi qu'à celui du public qui prête foi à ceux-ci. Mais ce qui nous mtéresse spécialement ici, c'est que le phénomène tient également à certaines particularités de l'évolution économique de la Russie. Il n'est pour s'en convaincre que de relire La Transformati,on économique de la Russie d'Edmond Théry, ouvrage publié à Paris en 1914. Impressionné par la croissance rapide que l'économiede ce pays arriéré Biblioteca Gino Bianco avait connue depuis la fin du siècle dernier, l'auteur avait eu l'idée de projeter dans l'avenir l'évolution observée entre 1900 et 1912. Et d'en conclure que, dans le domaine économique, la Russie finirait bientôt par rattraper et dépasser l'Occident ... Développement disproportionné de l'économie russe DEPUISfort longtemps, deux constantes marquent le développement de l'économie russe. D'une part, le progrès a toujours lieu par bonds, jamais de façon continue. D'autre part, ces bonds paraissent d'autant plus prodigieux qu'ils se produisent au milieu du marasme; ils résultent en effet d'une concentration des énergies et des ressources sur des secteurs très limités, qui laisse à peu près intact l'état arriéré du reste. Ces conditions générales défavorables finissent tôt ou tard par imposer à chaque bond un terme. Mais, paradoxalement, elles lui donnent de l'éclat aux yèux de l'observateur. Si les exploits de Pierre le Grand n'ont jamais cessé de fasciner, c'est qu'ils ont eu pour arrière-plan la Russie amorphe, misérable, rétrograde. La Russie dite soviétique n'est nullement sortie de ces ornières traditionnelles. Son développement économique est on ne peut plus désordonné. C'est une succession de catastrophes, de période& de stagnation et de bonds spectaculaires. Il suffira de consulter ci-après la courbe fantaisiste que le produit national a suivie : sa seule phase marquante est celle qui représente la projection théorique dans l'avenir. L'évolution de l'économie soviétique est non moins discordante en certains domaines. De tous les investissements effectués par le gouvernement entre 1929 et 1952 dans les installations et les équipements, 71 % étaient destinés à l'industrie, 20 % aux transports et 9 % à l'agri- ,

2 culture (Harry Schwartz: Russia's Soviet Economy, -Englewood Cliffs 1954). La première tentative pour amener l'industrie au niveau de l'Occident, tentative désignée trompeusement sous le nom de plan quinquennal (le premier), avait assené à l'agriculture un coup de massue dont elle ne s'est pas encore remise. (C'est d'ailleurs l'effondrement de l'agriculture qui mit fin à cette tentative forcenée.) Des disparités énormes se développent aussi entre les industries, la stagnation dans la production des biens de consommation contrastant avec l'essor de la fabrication d'équipements et d'armements. De 1929 à 1952, l'industrie lourde a accaparé neuf dixièmes des investissements ; l'industrie légère a dû se contenter d'un dixième (Harry Schwartz, op. cit.). Dans l'industrie lourde elle-même, certains produits et certaines entreprises se voient accorder des priorités démesurées, si bien que des usines ultra-modernes et d'autres depuis longtemps désuètes voisinent couramment. Un niveau de vie misérable est la conséquence logique de cet état de choses. Mais l'industrie doit payer elle aussi sa part pour ce développement désordonné, qui entraîne un lourd gaspillage. Non seulement la main-d'œuvre revient cher à cause de sa basse productivité, mais encore les disproportions empêchent toute articulation rationnelle du processus de production. Que de grandes centrales électriques ne puissent s'assurer les pièces détachées indispensables à moins de créer pour leur usage de petites usines mécaniques ; que •de grandes usines mécaniques en soient réduites à construire de petites centrales électriques _pour obtenir· une livraison continue de courant ; que des entreprises. industrielles doivent compter sur leurs propres fermes pour ravitailler le personnel - ce ne sont là que quelques exemples parmi beaucoup d'autres. Cependant, cette situation chaotique comporte un certain avantage.: elle permet d'obtenir dans des entreprises limitées certains succès spectaculaires. Ce serait une erreur d'évoquer à ce propos les fameux villages de Potemkine, car ces succès sont réels. Vers la fin du xv111° siècle la Russie fut le principal pays producteur de fer du monde. Quelque cent ans plus tard, elle occupa durant une courte période la première place dans la production pétrolière. Environ 1910, elle fut pendant quelque temps le cinquième pays du monde quant au volume de la production industrielle. Sa production de tissus de soie et de fibres artificielles occupait à la même époque la quatrième place. L'expansion de certaines branches de l'iµdustrie soviétique n'est pas moins remarquable. · , Force est, toutefois, de conclure au caractère peu convaincant des succès les plus marquants, puisque ceux-ci ne seraient pas possibles sans · le sous-développement de vastes domaines de l'économie, lesquels sé trouvent enfermés dans des limites arbitraires. Or bien des observateurs sont plus enclins à se laisser impressionner Bibliotecal Gino Bianco 'l 1 LB CONTRAT SOCIAL qu'à soumettre les phénomènes à une analyse approfondie. Tout au plus recourent-ils à la formule· commode : « Il est vrai que..., mais... ». Reste alors à leurs sympathies politiques, ou bien à leur masochisme social, à mettre l'accent sur les succès. Mirages statistiques LA VALEURde propagande du développement de l'économie est admirablement complétée par les mœurs soviétiques en matière de statistique. La statistique en tant qu'instrument de propagande est une découverte soviétique, et elle est systématiquement utilisée dans ce sens. Une statistique honnête se prête mal aux fins publicitaires : elle reflète les faits déplaisants au même titre que les autres. Il n'en va pas ainsi en U.R.S.S., où les chiffres produits ne sont, en principe, que des bulletins de victoire. Pour les statisticiens soviétiques, toute méthode scientifique n'est qu'un moyen de truquer les indices. Pendant de longues années, par exemple, ils ont submergé le monde de chiffres sur la production industrielle évaluée en . « prix constants de 1926-1927 », mais dans laquelle chaque produit nouveau était compté au prix de revient de la première année de sa fabrication. De ce fait, le volume était doublement grossi : d'une part, au cours de la première année, chaque produit revient incomparablement plus cher que par la suite, lorsqu'il est fabriqué en série; d'autre part, en raison d'une inflation accentuée et continue, le niveau général des prix fut beaucoup plus élevé pendant cette première année qu'en 19261927. Ce n'est là qu'un des nombreux artifices imaginés pour fausser les indices réels. Les statisticiens soviétiques ont recours à bien d'autres opérations frauduleuses, jusques et y compris la publication de matériaux comprenant de nombreuses lacunes et des chiffres purement et simplement inventés. On trouvera un aperçu fort instructif de ces procédés dans l'ouvrage de Naum Jasny : The Soviet z956 Statistical Handbook - A Commentary (1957). .,. . Les ~conomistes spécialisés, en p~emier lieu Serge N. Prokopovicz, ont peu à peu décelé la plupart de ces artifices. Mais ils ne pouvaient opposer aux chiffres soviétiques que des critiques savantes et minutieuses, rébarbatives pour le grand public. Tout au plus parvenaient-ils à calculer l'évolution dans des secteurs limités, tels la production du charbon ou le trafic ferroviaire, pour lesquels existaient des données en termes pl:iysiques : tonnes, kilomètres, etc. Cependan1:,même dans ce domaine, les possibilités n'ont jamais été bien grandes. Comme l'a démontré tout récemment Gregory Grossman dans Soviet Statistics of Physical Output of Indus• · trial Production (Princeton 1960), les données en termes physiques elles-mêmes sont fortement faussées.

PRODUCTIVITÉS COMPARÉES Ce sont les travaux de Colin Clark qui ont renversé la situation. Grâce à d'exceptionnelles aptitudes pour tirer des chiffres les renseignements qu'ils ne fournissent que lorsqu'on les compare entre eux, et aussi à sa connaissance des phénomènes économiques les plus .variés, Colin. ~lark a réussi à ramener les donnees de la statistique officielle à leur juste valeur et à les utiliser de manière à aboutir à une estimation plausible du revenu ou produit national tout entier. Le premier résultat de cet effort fut Critique of Russian Statistics, ouvrage pu~lié en 193?· L'année suivante parut le grand livre de Colin Clark, The Conditions of Economie Progress, où un important chapitre était cons~c~~au ,~ê~e sujet. Dans la seconde et la tro1s1eme edition (1951 et 1957), ce chapitre a été revu à fond et complété. En 1958, The Journal of Business de l'Université de Chicago publia, sous la même signature, une analyse comparative du développement de la productivité dans les principaux pays du monde, dont l'Union soviétique : «International Comparisons of Productivity Trends». Finalement, en 1961, parut une étude entièrement nouvelle, The Real Productivity of Soviet Russ~a -A CriticaZ-Evaluation, dont on trouvera ciaprès ~e adaptation abrégée . ~t .s~plifiée. à l'intention du lecteur non specialise ; certams éléments du présent texte ont été empruntés aux travaux précédents, en particulier à l'avantdernier. Depuis la publication des premières estimations de Colin Clark, d'autres auteurs ont essayé de calculer le produit ou revenu national de !'U.R.S.S. Les résultats varient considérablement suivant la méthode utilisée. Ainsi, Naum Jasny (Soviet Industrialization z928-z952, C~- cago 1961) estime que de 1928 à 1955 le produit national net s'est accru 3,7 fois; pour Ab~amBer~- son (The Real National Income of Soviet Russia since z928, Cambridge, Mass., 1961), l'accroissement est de 3,4 fois, alors qu'il n'est que de 2,7 fois d'après les calculs de Colin Clark. Ce qui compte ici, ce ne sont pas des différenc~s de ce genre, mais bien le caractère comparatif des estimations formulées par Colin Clark pour !'U.R.S.S. et pour d'autres pays, car les unes et les autres ont été obtenues par la même méthode et sont exprimées au moyen de la même unité : le dollar américain, avec son pouvoir d'achat effectif de 1950. Il. - La population soviétique Données officielles LE RECENSEMENT de janvier 1939 indiquait 9ue, dans les limites du territoire soviétique de 1 époque, la J?Opulationcomptait 170,6 millions d'4més. Se fondant sur l'expérience d'autres pays, il fautajouter à ce chiffrequelqueo,6million Biblioteca Gino Bianco 3 pour corriger la sous-estimation probable du nombre d'enfants âgés de moins de deux ans 1 • Ce qui fait au total 171,2 millions d'habitants. Les territoires annexés en 1939-1940 avaient une population d'environ ~2,5 millions ~'âmes 2 • Les changements apportes aux frontieres en 1945 ne semblent pas avoir beaucoup influé sur le nombre d'habitants. On peut donc estimer à 193,7 millions la population de 1939, si l'on tient compte du territoire actuel. Lorimer montre (pp. 134-135) qu'entre 1929 et 1934 - période de «collectivisation» dans l'agriculture, de désorganisation et de famine - un coup d'arrêt sérieux fut porté à la croissance de la population. A l'issue de cette période critique, en 1936, les lois autorisant l'avortement et la vente de produits anticonceptionnels furent brusquement abrogées 3 • Le nombre des naissances augmenta et, en 1937 et 1938, la population s'accrut de 3,5 millions _p~r an, ce qui équiv~u! à 4 millions sur le territoire actuel. L4 natalite ne semble pas avoir décliné après le recensement de janvier 1939. La pop_~ation se. ~erait don~ chiffrée à quelque 204 millions en JUID 1941, si l'on tient compte du territoire actuel. Tout le monde fut surpris lorsqu'on annonça officiellement 4 qu'en avril 1956 l'Union soviétique n'avait que 200,2 millions d'habitants, chiffre inférieur d'environ 4 millions à celui de 1941. Une confusion supplémentaire vient de l'a~rmation officielle selon laquelle le taux de croissance naturelle fut en moyenne de 1, 7 % par an pendant la période 1950-1956. Cela équivaudrait à un accroissement annuel de 3 millions au début et de 3,5 millions vers la fin de cette période. On pourrait en déduire qu'au début de 1950 !'U.R.S.S. n'avait que 180 millions d'habitants. Du même coup, on serait obligé d'estimer la population de 1945 à 175 millions au plus. Or, tout en évaluant à un niveau plus élevé que les autres auteurs les pertes subies pendmt la guerre, Timasheff a pu conclure que le nombre d'habitants · se situait, fin 1945, entre 180 et 181 millions5 • Raisons de douter L'ACCROISSEMENT démographique de plus de 3 millions par an semble confirmé par le recensement de janvier 1959. La différence entre les 208,8 millions atteints à cette date et les 200,2 millions d'avril 1956 porterait à croire que l'ac1. Lorimer: Th, Population of the Soviet U,iion, History and Prospects (S.d.N., Genève 1946). 2. Eason, Conférence mondiale sur la population, 1954; Prokopovicz : Histoir, ,conomiqu, de l'U.R.S.S. 3. La vente de contraceptifs et, dans une certaine mesure, l'avortement, furent de nouveau autoris~s en 1955. 4. L'Economi, national, d, /'U.R.S.S., R,cu,,.1 .statistiqu•, Moscou 1957 (en français). S, Amtr,.can Journal of SociololY, sept. 1948. , r

4 croissement annuel a été de 3,1 millions en -moyenne. On a toutefois de sérieuses raisons de douter de la réalité d'un tel taux de croissance. Il est peu probable que les résultats du recensement de 1959 aient été grossis et il en va de même du . nombre de naissances. Mais il est fort possible : a. Que l'enregistrement des décès ne soit _pas rigoureux (Lorimer a estimé qu'en 1926-1927 le nombre réel des décès dépassait de 28 °/4 le chiffre officiel) et que les estimations concernant l'accroissement naturel (naissances moins décès) aient été exagérées en conséquence ; · b. Que l'estimation -relative au mois d'avril 1956 ait été trop faible - cette opinion, partagée par Lorimer, est celle de la Fondation Scripps pour l'étude de la population (Oxford, Ohio), et même celle d'un économiste soviétique 6 , - peutêtre à dessein, et-que l'on obtienne donc un taux de croissance trop élevé en la comparant aux résultats du recensement de 1959 ; c.· Qµ'il faille majorer les chiffres, invraisemblablement bas, obtenus pour 1950 et 1945. · Le ta~ de 3 miUiori.s,avancé par les_sources officielles, ressemble curieusement aux affirmations de Staline. Dans son rapport au XVIIe Congrès du parti communiste, celui-ci prétendit qu'entre 1930 et 1933 la population était passée de 160,5 à 168 mi11ions 7 • Même en 1935, après la famine de 1933 et ses effets dévastateurs sur la ·croissance de la population, il continua -: « Nous avons maintenant, chaque année, un accroissement de population d'environ 3 mi11ions. Cela signifie que noùs avons tous les ans un accroissement égal à la population de la Finlande 8 • » Pareilles vantardises conduisent à des difficultés. C'est ce qui, de toute évidence, arriva lors du recensement de janvier 1937 dont les résultats ne furent jamais publiés.. Le 26 septembre 1937, le gouvernement fit la déclaration s•uivante: . « Etant donné qu'en procédant au recensement général du 6 janvier 1937 l'Office ·central des comptes économiques près la Commission du plan· viola grossièrement les principes élémentaires de la science statistique et les instructions du gouvernement, le Cons.eil des commissaires du peuple considère que l'organisation ··du recensement n'est pas satisfaisante et que les re~seignements recueillis- sont •défectUeux. ,Le Çonseil des· com:mjssaires du peuple de l'U~R.-S.S. charge l'Office central- des çomptes •économiques d'entreprendre un ·nouveau· recensement ·en j~~ vier 1939 9 • » · · ·· -- ·· Le Russian News Bulletin affirmait- que le recensement de 193-7avait été .mené à .b. ien par 6. Sonine : Problèmes de la reproduction socialiste, Moscou . 1958., p. 258• . 7. U.R.S.S. Bilan 1934, Paris., pp. 66-67. 8. Konuomolskaia Pra'IJda., 4 déc. 1935. 9. Russian News Bulletin (Institute for the Study of Contcmporary Russia)., 15 nov. 1937. Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL un personnel beaucoup plus qualifié que celui de 1926 et qu'il avait été préparé par une campagne ·de presse appropriée. L'interdiction de publier ses résultats ne fut décidée,- suggérait-il, qu'à cause de leur incompatibilité avec les chiffres trop élevés antérieurement fournis. Peu de temps avant le recensement, on estimait la population à 175 ou 180 millions, ce qui eût représenté un accroissement considérable par rapport aux 147 millions de 1926. Lorimer a noté que le plan pour 1937-1942, établi en 1936, avait indiqué, pour 1937, 180 millions d'habitants, chiffre de 10 millions supérieur à celui qu'on_ allait finalement constater en . 1939. Comment préparer un plan économique sans même connaître la population du pays, c'est ce qui n'a jamais été expliqué. D'autre part, les dirigeants semblaient décidément souhaiter la croissance de la population. Khrouchtchev affirma dans l'un de ses discours : « Si à nos 200 millions d'habitants venaient_se joindre 100 autres millions, nous n'en aurions encore pas assez 10 • » Et de déclarer que chaque famille doit avoir au moins trois enfants. Révélations des statistiques électorales LE CORPSÉLECTORAeLnglobe tous les habitants âgés d'au moins 18 ans, sauf les prisonniers, les anciens prisonniers sous surveillance., les personnes placées dans des hôpitaux psychiatriques, etc. Les données disponibles ont été rassemblées dans le tableau suivant11 : · Déc. 1937 Juin 1938 Déc. 1939 Fév. 1946 Fév. 1947 Mars 1950 Mars 1951 Mars 1954 Mars 1955 Mars 1957 · _Mars 1958· Mars 1959 ··Nombre d'électeurs (èn millions) 94,.I 93,7 93,5 101,7 . 103,9 III,I 113,1 120,7 123,2 130,9 133,8 136,4 Nombre hypothétique de prisonniers, aliénés, etc. (en· millions) 3,0 5,0 . . . .. . . . Le corps électoral augmente d'année en année : le tableau montre qu'il s'est accru de 2,2. millions en 1946 ; de 7,2 mHHons entre 1947 et 1949; de 2 mHHons en 1950; de 7,6 mi11ionsau cours des années 1951-1953 ; de 2,5 mjlHons en 1954 ;·de 7,1 mHHonsen 1955-et 1956; de 2,9 millions en 1957 ; de 2,6 mjllions en 1958. Cette a.-oissance est surtout celle des jeunes gens atteignant 18 ans. On peut établir leur force numérique en estimant le nombre de naissances ~ 10. Pravda, 8 janv. 1955. ·r r. Bulletin (lnstitute for the Study of USSR, Mimich), mai. 1957 et numéros ultérieurs. . · .

PRODUCTIVITÉS COMPARÉES d'année en année et le taux de mortalité qui réduit chacune de ces classes d'âge avant qu'elle n'arrive à la majorité. Il apparaît ainsi que 5 ~- lions de citoyens soviétiques ont atteint la maJorité en 1946; 11,7 en 1947-1949; 3,8 en 1950; 11,1 en 1951-1953; 4 en 1954; 10 en 19551956; 4,5 en 1957 ; 4,1 en 1958. On voit que l'accroissement du corps électoral pendant chaque période est inférieur au nombre d'habitants atteignant 18 ans. C'est que, simultanément, le corps électoral est affecté par les décès frappant la partie de la population âgée de 18 ans révolus. Si l'on fait abstraction de l'éventuelle diminution des détenus et de l'inscription sur les listes électorales d'électeu~s qui n'y figuraient pas encore, on peut donc considérer que la différence entre l'accroissement du corps électoral et les individus atteignant I 8 ans correspond à la mortalité des adultes : 2,8 en 1946; 4,5 en 1947-1949; 1,8 en 1950; 3,5 en 1951-1953; 1,5 en 1954; 2,3 en 1955-1956; 1,6 en 1957 ; 1,6 en 1958. En ajoutant à ces chiffres les estimations re~atives au nombre de décès frappant les moms de 18 ans, on obtient des données représentant l'ensemble des décès, moins les diminutions des effectifs des détenus et les inscriptions tardives sur les listes électorales. Or, il n'est que de confronter ces estimations à la statistique officielle des décès pour se convaincre que celle-ci ~st incompatible avec la statistique, non moms officielle, du corps électoral : 1946 1947-9 1950 1951-3 1954 1955-6 1957 1958 Décès,moins libérations, etc. 4,3 8,5 2,4 5,0 1,9 2,9 1,9 1,8 Données officielles sur les décès 1,74 5,25 1,73 3,16 1,55 Donc, le seul moyen de concilier la statistique de la mortalité avec celle du collège électoral serait d'admettre que le nombre de prisonniers croît rapidement. Si l'on ne veut pas adopter cette hypothèse peu vraisem~lab,le, le n~mbre officiel de ~écès doit être maJore d'un uers pour les dermères années et davantage pour les années antérieures. Autant dire qu'il importe de substituer à la statistique officielle des estimations indépendantes. Estimations indépendantes POUR dénombrer les décès survenant d'année en année, on peut utiliser les estimatio~s de Roof ~~ selon lesquelles le taux de mortalité se situait entre 25 et 30 p. 1.000 en 1946 et audessu~ de 30 en 1947, année de famine consécutive à une grande sécheresse. 12. Communic3tioo privc!e. Biblioteca Gino Bianco 5 D'autre part, le chiffre officiel indiquant les décès enregistrés en 1958 a été majoré du quart. Finalement, les estimations pour les années 1947 à 1958 se fondent sur l'hypothèse que le nombre absolu de décès diminuait _en moyenne de 4 % par an. On peut comparer ces estimations aux chiffres établis ci-dessus et qui représentent la mortali~é globale, moins la diminution du nombre des pnsonniers et les inscriptions tardives sur les listes électorales. La différence entre les deux chiffres devrait exprimer d'une manière plausible la diminution des effectifs détenus, l'enregistrement tardif d'électeurs, etc. Voici les deux séries, en millions : 1946 1947-9 1950 1951-3 1954 1953-6 1957 1958 Décès (estimationJ 4,5 II,O 2,7 1,4 2,3 4,3 2,0 1,9 Décès, moins libérations, etc. 4,3 8,5 2,4 5,0 1,9 2,9 1,9 1,8 Différence 0,2 2,5 0,3 2,4 0,4 1,4 0,1 0,1 Ces résultats sont-ils plausibles ? En 1939, la différence entre les chiffres établis respectivement par le recensement et par la statistique électorale indiquait que les effectifs détenus, les internés dans les hôpitaux psychiatriques, les électeurs non inscrits, etc., ne représentaient pas moins de 6,5 millions d'âmes. Il est permis de supposer que dans la situation trouble de 19451946 le nombre de prisonniers fut très élevé (~ fallait « rééduquer » de nombreux citoyens . qw avaient connu d'autres pays) et que les listes électorales présentaient beaucoup de lacunes. La soustraction opérée ci-dessus montre que _la réduction du nombre des détenus et la rermse en ordre des listes électorales portèrent, entre 1946 et 1958, sur 7,4 mil1ions de personnes : le chiffre n'est pas invraisemblable. L'ét~pe suivante co7:1s!ste à confron~er les estimations de la mortalite avec les chiffres de la natalité ; pour les années 40, ces derniers ont été estimés; à partir de 1950, ils sont empruntés à la statistique officielle. _En déduisant les dé~ès des naissances, on obtient les taux de croissance naturelle qui, à leur tour, permettent de remonter du recensement de 1959 (majoré de o,6 million) jusqu'aux effectifs de 1946 ( en millions) : 1946 1947-49 1950 1951-53 1954 1955-56 1957 1958 1959 Population au début de la période 182,s 181,9 185,3 187,4 194,7 197,5 203,3 206,3 209,4 Naissances 3,9 14,4 4,8 14,7 5,1 10,1 <s> <s> Décès 4,S 11,0 2,7 7,4 2,3 4,3 2,0 1,9 ,

6 L'estimation relative à 1946 se rapproche de · celle de Timasheff. Au moyen de l'interpolation linéaire, pour avril 1956 la population peut être estimée à 201,4 millions d'âmes, au lieu des 200,2 millions officiellement annoncés. Dès lors, le taux d'accroissement annuel est non pas de 1,7 ou 2 %, mais bien de 1,5 o/o. III. - Le produit national . , . sov1et1que LE PRODUITNATIONALest affecté, dans des proportions diverses, à différents emplois majeurs : alimentation, autres consommations privées, logement, formation de capital nouveau, dépenses militaires, enseignement, services de santé, administration, police. Pour estimer le produit global, il s'agit de calculer séparément les sommes attribuées à chacun de ces postes et de les additionner. Encore faut-il convertir tous les chiffres en unités permettant de comparer les résultats à ceux d'autres pays. En comparant les produits et revenus réels des pays européens, l'Organisation européenne pour la coopération économique (O.E.C.E.) a décidé d'exprimer toutes les valeurs en dollars américains (pouvoir d'achat de 1950). Cette unité ayant déjà été amplement utilisée, il sera opportun d'y recourir lors des comparaisons qui vont suivre. Agriculture et alimentation PARMIles postes entre lesquels est réparti le produit national soviétique, le plus important est l'alimentation. On ne peut l'évaluer d'après le volume des ventes au détail : il est trop difficile de mesurer les effets du rationnement et de la diversité des prix dans les villes ; de plus, une partie considérable des produits agricoles sont consommés directement sur le lieu de production. C'est à la production agricole destinée à la consommation que seront appliqués les prix de détail américains de 1950. La récolte de céréales· et de pommes de terre n'est pas consommée tout entière par la population. Abstraction faite de la semence, une quantité considérable de ces produits sert à nourrir le bétail; les porcins, en particulier, sont nourris presque exclusivement de grains et de pommes de terre. Afin de faire le départ entre les produits destinés respectivement à l'élevage et à la consommation, il faut adopter un expédient, qui d'ailleurs serre de près la réalité : supposer que la consommation de céréales et de pommes de terre par · tête d'habitant demeure constante et qu'on nourrit le bétail avec ce qui reste. Pour évaluer la quantité .de ces denrées que consomme en moyenne le citoyen soviétique, Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL on peut s'appuyer sur diverses estimations anté• rieures. La consommation de céréales est ainsi fixée, s·ans risque d'erreur notable, à 161 kilos (équivalent de 145 kg de farine ou de 227,5 kg de pain) et celle de pommes de terre à 200 kilos (équivalent de 40 kg de farine) par tête et par an. Etant donné la qualité du pain soviétique, ces quantités correspondent respectivement à 61,5 et 20,4 dollats. Calculée par tête d'habitant, la consommation de légumes et de fruits est, elle aussi, pratiquement constante ; la quantité globale évolue à peu près proportionnellement à la population. Mais les informations sur la consommation de ces denrées sont. maigres. Les détenus d'un camp de concentration étudié par Wiles reçoivent 36 kilos de légumes par tête et par an 13 • Pour les fruits et légumes, les estimations varient entre 68 kilos pour 1925-1927 14 et 100 pour 1935-1938 15 ou 110 pour 1936-1938 16 , soit en moyenne 50 kilos de légumes et 30 kilos de fruits par tête et par an. En prix américains, ces quantités réunies représentent 27 dollars. Le volume de la production globale de viande est connu pour de nombreuses années. Il permet de résumer la courbe de la consommation selon les chiffres suivants, relatifs à toutes les sortes de viande (lapin, volaille et cheval compris, de même que les graisses et, probablement, les déchets) : 4,6 millions de tonnes en 1913 sur le territoire que !'U.R.S.S. allait recouvrir pendant les années 1921-1939; 2,45 en 1922; 5,12 en 1928 ; 2,10 en 1934; 3,09 en 1937 ; 5,0 en 1939 ; 3,62 en 1946 (territoire actuel); 2,73 en 1948 ; 5,12 en 1952; 6,10 en 1954; 6,75 en 1957. Le prix d'un kilo peut être estimé à un dollar. Les statistiques de la production laitière au cours des dernières années sont très discutables. Pour obtenir des chiffres raisonnables, il faut recourir au rendement par animal enregistré au cours des années 30, puis en déduire des estimations pour les années 1945-1950. Pour l'année 1952 le résultat est corroboré par une information sur le rendement moyen, découverte par J asny dans un journal de province 17 ; celui de 1956 est confirmé par une déclaration du .secrét~e du parti communiste biélorussien 18 • En multipliant ces rendements moyens par le nombre de vaches laitières, on peut conclure que la production de lait a évolué comme suit : 24,7 millions de tonnes en 1913; 22,6 en 1922; 30,5 en 1928 ; 18,8 en 1933 ; 26,1 en 1937 ; 33,6 en 1940; 24,0 en 1946; 27,4 en 1952; 31,1 en 1954; 40,8 en 1957. Si l'on prend en considéra13. Bu!lefin of the Oxford Institute of Statistics, sept. 1953. 14. Volin : A Survey of Sooiet Russian Agriculture, Washington 1951. 15. Klatt, in Economia Internazionale (Gênes), 1952. ,. 16. Hahn : The Food Economy of Europe, Iéna 1942. 17. Communication privée. 18. Sovietskaia Biéloroussia, fév. 1957.

PRODUCTIVITÉS COMPARÉES tion la proportion consommée sous forme de beurre et de fromage, une tonne vaut 16o dollars. La production du poisson a subi l'évolution suivante : 1.018 millions de kilos en 1913; 840 en 1928; 1.303 en 1933; 1.609 en 1937; 1.566 en 1939; 1.208 en 1946; 1.575 en 1948; 2.107 en 1952 ; 2.505 en 1954 ; 2.850 en 1956. Le prix de détail est de 0,45 doll~r le kilo. La production du sucre, dont un kilo vaut 0,214 dollar, s'est développée comme suit: 1.347 millions de kilos en 1913; 227 en 1922; 1.283 en 1928; 995 en 1933 ; 2.421 en 1937; 2.165 en 1940; 466 en 1946; 1.666 en 1948; 3.067 en 1952; 2.611 en 1954; 4.500 en 1957. Données relatives à la consommation des œu/s: 6,6 milliards d'unités en 1913; 10,8 en 1928; 4,2 en 1932; 8,2 en 1937; 12,2 en 1940; 16,1 en 1953 ; 21,4 en 1957. Mille œufs coûtaient 33,6 dollars en 1950. Selon le professeur Baykov, on a consommé en Russie 0,13 million de kilos de thé en 1913, 0,25 en 1928, 0,65 en 1932, 7,1 en 1937 et 18 en 195119 • Un kilo de thé coûte 2,84 dollars. Enfin, la · consommation des huiles végétales - valeur : 660 dollars la tonne - peut être estimée à 0,4 million de tonnes en 1913, 0,85 en 1928, 1,65 en 1940, 0,85 en 1946, 2,0 en 1952 et 3,4 en 1957. En convertissant en dollars les données concernant toutes les denrées et en additionnant les chiffres ainsi obtenus, on peut suivre l'évolution de la consommation alimentaire d'année en année. En voici le tableau (milliards de dollars de 1950) : 1913 25,26 1922 21,70 1928 28,07 1934 24,96 1937 28,02 1940 35,96 1946 29,10 1948 29,25 1952 34,69 1954 36,71 1957 41,79 Ces chiffres entrent dans le calcul du produit national et en constituent la composante la plus importante. Ils sont aussi très révélateurs par eux-mêmes. Lorsqu'on les compare aux chiffres de la population, tels que ceux-ci ont été déterminés plus haut, ils témoignent du sort des habitants. Ils révèlent en effet que la consommation alimentaire par tête a très peu augmenté depuis l'époque tsariste, voire que, pendant certaines périodes, elle est tombée au-dessous. Elle représentait 181 dollars en 1913, 165 en 1922, 191 en 1929, 156 en 1934, 183 en 1939, 161 en 1948, 181 en 1952 et 204 en 1957. 19. Bull,tim on Sovi,t Economie D,v,lopm,nt (Univer1it6 de Birmin1ham). Biblioteca Gino Bianco 7 Autres consommations privées UNE AUTRETRANCHEm, oins importante, du produit national va à la consommation de biens non alimentaires (textile, habillement, chaussures, tabac, boissons alcooliques, meubles, articles ménagers, etc.) et de services. Cependant, il ne faut pas inclure tous les services dans cette catégorie. En particulier, le logement doit être considéré séparément, de même que les services fournis gratuitement par l'administration publique, tels l'enseignement et les soins hospitaliers. Au premier chef, entrent dans cette tranche du produit national la fourniture de courant électrique, les transports en commun, les spectacles, etc. L'ensemble de ces biens et services consommés en 1913 par la population du futur territoire soviétique d'entre les deux guerres mondiales, représentait 7,25 milliards de dollars. Par la suite, ce chiffre ne fut plus jamais atteint, malgré la croissance du nombre de consommateurs, avant 1936. En effet, cette partie de la consommation privée représentait 5,47 milliards en 1928 pour atteindre 7,9 milliards en 1937. Elle diminua ensuite, au point qu'en 1940 sa valeur ne fut que de 7,58 milliards sur le territoire actuel, considérablement agrandi par les annexions. L'évolution ultérieure ressort des chiffres suivants : 9,14 milliards en 1950, 13,19 en 1953 et 17,94 en 1956. En recalculant ces données par tête d'habitant, on s'aperçoit que le bas niveau du temps du tsarisme - 52 dollars en 1913 - ne fut approximativement rattrapé qu'après 1950, époque où le chiffre correspondant n'était encore que de 49 dollars. Au cours de la période intermédiaire, la situation était pire : 36 dollars en 1928, 48 en 1937, 38 en 1940. Après 1950, la croissance fut plus rapide : 70 en 1953, 89 en 1956. Le logement VIENT ensuite la part du produit national consacrée au logement. On peut la calculer en déterminant l'étendue globale de la surface habitable et en calculant d'autre part la valeur locative du mètre carré. Il y a peu de temps encore, les statistiques étaient fondées sur une définition étroite de la surface habitable, laquelle ne tenait compte que des pièces d'habitation proprement dites. Or, lassées sans doute de se voir reprocher les conditions de logement inadéquates et l'exiguïté de la surface habitable dans les villes, les autorités se décidèrent à modifier la définition, de manière à inclure dans la surface habitable escaliers, corridors, salles d'eau, etc., et probablement aussi à mesurer les immeubles non pas à l'intérieur mais à l'extérieur et à compter également les dépendances. , ,

8 . Certes, il existe parfois de bonnes raisons statistiques de faire des changements de ce genre. Mais rien ne. peut justifier la publication, pour les années antérieures, de chiffres non ajustés ou insuffisamment ajustés à la nouvelle définition. Cela vise à créer l'illusion d'une croissance rapide, artifice coutumier de la statistique soviétique. . · En réalité, la surface habitable selon l'ancienne définition ne représentait que 65 % de celle que fait apparaître la nouvelle 20 • D'autre part, sans en faire mention dans les tableaux, on étend sans cesse le secteur urbain en y incluant des logements classés jusqu'alors comme ruraux. Dans la présente analyse, le logement « cidevant rural» doit être exclu de la surface urbaine habitable et réintégré dans la surface rurale. Faute de quoi le simple reclassement administratif qui transforme des logements ruraux en logements urbains entraînerait une augmentation de leur valeur, puisque le mètre carré de surface habitable revient sensiblement plus cher dans les villes qu'à la campagne. Cependant, les totaux officiels cachent de toute évidence un autre changement de définition. Ils suggèrent que dans les villes la surface habitable par tête augmente entre 1940 et 1956. Cela est démenti par les données sur les villes dont il s'agit, lesquelles montrent au contraire. une diminution. Il semble donc indiqué de réduire de 10 % le chiffre actuellement avancé. De 668 millions· de mètres carrés, la surface urbaine habitable est ainsi ramenée à 601 millions. Si l'on en défalque quelque 20 millions de surface« ci-devant rurale», on arrive à 581 millions. La réévaluation des données officielleset l' examen critique des estimations de Sosnovy, Prokopovicz, Bergson et Heyman, de Méquet 21 et d'Eason 22 permettent de conclure que, dans les frontières du territoire soviétique de 1921-1939, la surface habitable (nouvelle définition) évoluait à peu près_comme suit (millions de mètres carrés) : Urbaine Rurale 1913 (fin d'année) 262 330 1928 )) )) . 251 355 1932 )) )) 285 355 1937 )) )) 326 355 1941 (fin juin) 358 355 L'annexion de territoires commencée en 1939 se solda par une extension des surfaces habitables, tant urbaine que rurale. A fin juin 1941, la première comptait 358 millions de mètres carrés sur le territoire d'entre les deux guerres et 397 milli~ns sur le n9uveati territoir ~ ; pour le logement rural, les chiffres correspondmts sont 355 et 20. Sosnovy, in Problems of Communism, nov.-déc. 1956. 21. Revue internationale du travail, vol. 25. 22. Conférence mondiale sur la population, 1954.• Biblioteca Gino Bianco LE CONTRAT SOCIAL 405 millions. Voici donc les estimations relatives à l'évolution à l'intérieur des frontières actuelles : Urbaine Rurale 1941 (fin juin) 397 405 1947 (fin d'année) 380 325 1952 » » 475 356 1954 > )) 527 372 1956 » » 581 395 Pour déterminer la valeur locative de ces surfaces en dollars de 1950, il faut prendre pour point de départ les dimensions et le loyer de l'appartement urbain moyen aux Etats-Unis en 1950. D'après la notion étroite de surface habitable - notion correspondant à l'ancienne définition - cet appartement mesurait 93 mètres carrés ; il était loué, si l'on déduit l'éclairage et le chauffage habituellement inclus dans les loyers américains, 435 dollars 23 • Pour les appartements urbains et ruraux non paysans, le loyer correspondant était de 415 dollars, et pour les maisons paysannes, de 231 dollars. - Dans le logement rural, les éléments de confort (tout à l'égout, eau courante, bains, w.-c., chauffe-eau, courant électrique) sont fort réduits, sinon inexistants. La valeur locative de ce logement peut être estimée à 1,25 dollar le mètre carré ; celle du logement urbain moyen à peu près bien équipé à 3,5 dollars, soit 2,28 dollars d'après la nouvelle définition. En multipliant ces prix par la surface. habitable urbaine et rurale, telle qu'elle figure dans les deux tableaux précédents, on obtient la valeur locative annuelle totale du logement soviétique en milliards de dollars. D'abord dans les frontières de 1922-1939 : Logement Logement Total urbain rural 1913 (fin d'année) 0,60 0,41 1,01 1928 J) )) 0,57 0,44 1,01 1932 )) J) 0,65 0,44 1,09 1937 )) J) 0,74 0,44 1,18 1941 (fin juin) 0,82 0,44 1,26 L'annexion de territoires houveaux influa évidelD.lDienstur la valeur globale du logement comme sur la surface habitable totale. A la fin du prenµer semestre 1941, cette valeur était de 1,26 miUiard de dollars pour le territoire ancien et de 1,41 pour le territoire actuel. Son évolution ultérieure se résume dans le tableau suivant : Logement Logement Total urbain rural 1941 (fin juin) . 0,90 0,51 1,41 1947 (fin d'année) 0,87 0,41 1,28 1952 )) » 1,08 0,44 1,52 1954 l) > 1,20 0,47 1,67 1956 )) 1 1,32 0,49 1,81 23. Gilbert et Kravis : An International Compariso,c oj National F. ·-,d_uctsand the . Purchasing Power of Currencies, O.E.C.E., Pa.es.

PRODUCTIVITÉS COMPARÉES A ce propos encore, le trait frappant de l'évolution se manifeste dès qu'on établit les moyennes par tête d'habitant. Malgré l'afflux de la population des campagnes vers les villes, où un mètre carré de surface habitable vaut près du triple du mètre carré rural, la valeur du logement par tête d'habitant n'a augmenté que très faiblement entre 1913 et 1956. Avant la première guerre mondiale, elle représentait à peu près 7 dollars ; elle se maintint à ce chiffre jusqu'en 1948. Deux ans plus tard, elle atteignait environ 8 dollars, et en 1955 et 1956, 9 dollars. Les investissements PoUR DÉTERMINElRa part du produit national consacrée à la formation du capital supplémentaire, il faut entreprendre des calculs assez compliqués. C'est que les investissements effectués dans l'économie nationale ne servent qu'en partie à la création de capital nouveau ; l'autre partie compense l'usure des installations et des équipements existants. Il s'agit donc d'estimer la dépréciation du capital déjà engagé dans la production en même temps que la valeur brute de tous les investissements. C'est la différence entre l'une et l'autre qui indique le volume du capital nouveau. Autre complication : les investissements ne concernent pas seulement l'équipement et les immeubles, mais encore le capital circulant (dont le bétail). Il convient alors d'emprunter une autre méthode. Au lieu de calculer d'abord les investissements bruts et d'en déduire la dépréciation du capital existant, · on estime directement l'investissement net : on en détermine le volume au regard des investissements bruts dans le capital fixe (immeubles et équipement). Mais, de toute manière, on ne saurait faire à propos du capital circulant que des estimations fort incertaines. Les résultats de tous ces calculs sont résumés dans le tableau suivant qui indique, en milliards de dollars, la valeur de l'ensemble du capital nouveau (investissement net) sous toutes ses formes (immeubles, équipement, capital circulant) : 1928 0,9 1933 - 0,4 1937 7,9 1940 3,7 1942 - 5,4 1946 1,0 1948 9,5 1952 11,9 1954 13,6 1956 15,3 Ce tableau est révélateur. Tout d'abord, parce qu'il refl= la grave crise où fut précipitée l'économie soviétique à l'issue du premier plan quinquennal, crise qui résulta de la collectivisation Biblioteca Gino Bianco 9 forcée de l'agriculture. Or les investissements dans les installations, équipements et capitaux circulants de l'industrie s'accroissaient considérablement au cours de ces années. En revanche, le cheptel allait diminuant. Sa valeur, après avoir augmenté de 0,35 milliard de dollars en 1928, diminua de 0,90 milliard en 1929, de 1,30 en 1930, de 1,63 en 1931, de o,86 en 1932 et de 0,77 en 1933. Le tableau reflète également une certaine dépre~- sion qui se manifesta après 1937, l'année la plus favorable d'avant guerre. Une fois de plus, l'agriculture en fit les frais : la valeur du cheptel qui, en 1937, s'était accrue de 0,49 milliard de dollars, demeura presque inchangée (accroissement de 0,08) l'année suivante et diminua de 0,38 en 1939 et en 1940 (malgré les annexions de territoires). Finalement, la part du produit national servant à l'expansion du capital s'accrut énormément. Le nouveau capital ajouté au cours de l'année 1956 représente 17 fois celui de 1928. Or, comme on le verra plus loin, le produit national n'a été en 1956 que 2,8 fois celui de 1928. Il est vrai que la formation de capital nouveau fut très réduite avant le lancement des plans quinquennaux. Mais, même si l'on tient compte de cette circonstance, la disproportion entre la croissance du produit national et celle du capital saute aux yeux. Elle prouve qu'en Union soviétique l'expansion économique favorise le capital et non le monde du travail. On peut aussi tirer de cette disproportion cet autre enseignement : le capital investi s'accroît incomparablement plus vite que le produit, cc qui témoigne d'un évident gaspillage. Les dépenses militaires EN· CE QUI CONCERNlEa tranche du produit national absorbée par les dépenses militaires, on possède des données globales, mais il n'est pas possible de convertir ces chiffres en dollars de 1950 : le rapport entre le pouvoir d'achat du rouble et celui du dollar varie considérablement selon la nature des biens, et les dépenses militaires portent sur des biens fort différents. Il convient donc de diviser les dépenses de cet ordre en catégories différentes de biens. Pour estimer la part représentée par l'équipement, il faut tenir compte des indices de production des biens militaires finis, tels qu'ils ont été compilés par Shimkim. Le calcul du coftt d'entretien des soldats part de l'hypothèse qu'à rartir de 1937 il équivaut au salaire moyen de 1ouvrier industriel et qu'avant d'atteindre ce niveau il augmentait de 1,5 % par an depuis 1928; ces estimations sont multipliées par le nombre d'hommes sous les drapeaux. On obtient ainsi (voir page suivante) un tableau en milliards de roubles (prix courants). ,

10 1928 1934 1937 1940 1948 1950 19SS 1958 Dépenses glohales 0,76 5,0 17,5 56,7 66,3 83,0 II2,l 96,3 Dont: Equipement 0,60 2,92 8,15 (19) 17,8 15,7 21,6 (27,5) Solde et entretien des soldats 0,16 1,1 4,3 18,3 24,8 33,3 34,7 34,2 Autres dépenses 1,0 5,0 19,4 23,7 34,0 's5,8 34,6 Les « autres dépenses » représentent les biens de consommation autres que denrées militaires, textiles, habillement et chaussures. La croissance rapide de cette portion des dépenses militaires - rapide surtout en comparaison du coût d'entretien des soldats - s'explique aisément. A mesure que les forces armées se mécanisent, les sommes dépensées, pour les combustibles par exemple, augmentent beaucoup plus vite que les dépenses relatives au personnel. · Il ne reste qu'à appliquer aux chiffres concernant chaque composant du budget militaire le coefficient correspondant à la différence entre le pouvoir d'achat du rouble et celui du dollar pour les ·biens en question. Cette conversion ne soulève pas trop de problèmes pour les équipements militaires et les biens de consommation autres que l'alimentation,· les textiles, l'habillement et les chaussures. Pour ces biens, on possède des indices de prix soviétiques et américains (à l'équipement militaire sont appliqués les prix des biens d'équipement). La question se pose toutefois de savoir comment déterminer en dollars le coût d'entretien d'un soldat soviétique ou., ce qui revient au même, comment estimer la valeur des services par lui rendus. D'aucuns affirment qu'« un soldat est un soldat». Si l'on acceptait cette formule., il en faudrait conclure que les services fournis par le soldat sqviétique valent à présent ce qu'ils valaient en 1928 et aussi qu'ils valent autant que ceux du soldat américain. Ce qui est insoutenable. Le degré d'instruction du soldat, ses connaissances techniques et ses capacités professionnelles diverses contribuent considérablement à sa valeur. La solde et l'entretien d'un soldat américain revenaient en 1950 à 2.951 dollars 24 • La valeur des services obtenus en 1950 du soldat soviétique moyen est estimée ici à 1.750 dollars. La somme des diverses dépenses converties en dollars permet de réévaluer le budget militaire entier : 1,07 milliard en 1928, 2,07 en 1934, 5,1 en 1937, 12,6 en 1940, 9,6 en 1948, 12,7 en 1950, 18,9 en 1955 et 17 en 1958. 24. U.S. Income and Outp1:4t (Department of Commerce), p. 213. . Biblioteca Gino Bianco - '.I LE CONTRAT SOCIAL Enseignement, santé, administration et police RESTENT à évaluer les services gouvernementaux dans l'enseignement çt la santé publique, aussi bien que les dépenses d'administration et de sécurité intérieure. Pour cela, il faut prendre pour base les statistiques de l'emploi. Les effectifs suivants, chiffrés en millions d'individus, ont été employés dans ces services 25 : Santé Enseignement Administration Total publique et recherche et police 1928 0,40 0,79 1,01 2,20 1932 0,67 1,40 1,65 3,72 1937 1,13 2,32 1,49 4,97 1940 1,51 2,93 1,83 6,27 1945 1,42 2,55 1,65 5,62 1950 2,05 3,75 1,83 7,63 1956 2,78 4,75 1,34 8,87 Contrairement au calcul concernant les militaires, il n'a pas été jugé nécessaire de prendre ici en considération une éventuelle amélioration des services. On suppose donc que, pendant toute la période étudiée, seules les personnes dûment qualifiées étaient admises à exercer l'enseignement, la médecine, à entrer dans l'administration, etc., et que le niveau de leur qualification professionnelle n'a pas changé. La valeur moyenne des services fournis par une personne engagée dans ces activités est estimée à 3.000 dollars. En multipliant ce montant par les effectifs totaux du tableau ci-dessus, la part du produit national consacrée auxdites activités gouvernementales s'établit ainsi : 6,6 milliards de dollars, en 1928; 11,2, en 1932; 14,8, en 1937 ; 19,8, en 1940 ; 16,9, en 1945 ; 22,9, en 1950 ; 26,6, en 1956. Le produit national global LADERNIÈROEPÉRATION à faire pour achever le calcul du produit national soviétique en prix de détail américain est des plus simples. Il s'agit de totaliser les différentes dépenses : alimentation, autres consommations privées, logement, formation de capital nouveau, dépenses militaires, enseignement, santé, administration et police. En d'autres termes, d'additionner les diverses estimations précédemment fournies 26 • Voici donc comment le produit national net, en milliards de dollars, a évolué de 1913 à 1956, , 25. L'Economie nationale de /'U.R.S.S. Recueil statistique. 26. Seule exception : l'année 1913, pour laquelle il a fallu procéder différemment. Le produit national de 1913. a été calculé par voie de réévaluation du revenu national, c'est-à-dire de la valeur globale, en prix de revient, de tous les produits autres que les denrées alimentaires et le logement. ·

PRODUCTIVITÉS COMPARÉES d'abord à l'intérieur des frontières de 1921- . 1939 : 1913 42,0 1928 43,1 1932 47,7 1933 44,9 1937 64,8 1939 69,4 puis sur le territoire actuel .. 1940 79,9 1948 78,9 1952 102,5 1954 111,6 1956 119,4 Le produit national s'est donc accru 2,8 fois en l'espace de 43 ans. Dans cette croissance, un certain rôle revient à l'expansion territoriale, ainsi qu'en témoignent les chiffres ci-dessus qui indiquent une différence de 10,5 milliards (accroissement de 15 %) entre les produits respectivement obtenus en 1939 et en 1940. IV. - La productivité réelle de la Russie soviétique LE PRODUIT par tête d'habitant est passé entre 1913 et 1956 de 301,5 à 591,9 dollars, augmentant à peu près du double. Cette confrontation du produit national et du volume de la population ne peut évidemment remplacer l'analyse de l'évolution de la productivité. L'objectif final de la présente étude, du reste, est la productivité comparée de différents pays. La population active varie considérablement d'un pays à l'autre. Dans un pays riche, les enfants restent en règle générale plus longtemps à l'école; les personnes âgées prennent leur retraite plus tôt ; les ouvrières mariées sont moins nombreuses, surtout lorsqu'elles ont des enfants en bas âge. En outre, il peut y avoir de grandes différences dans la composition de la population quant à l'âge de ses membres. Si le produit national s'accroît grâce au travail de personnes âgées et d'enfants, ainsi qu'à un horaire prolongé imposé à chaque ouvrier, on ne saurait y voir un essor de la productivité. Afin de connaître la productivité réelle, il faut déterminer les dimensions du produit obtenu par heure de travail. Il importe donc de diviser le produit national par le nombre d'heures de travail fournies au cours d'une année dans l'ensemble du pays et dans tous les secteurs écononomiques. Pour ce faire, on a besoin en premier lieu de donnéessur l'emploiet la duréemoyenne du travail. Biblioteca Gino Bianco 11 La durée totale du travail Au SUJET des ouvriers et employés, tantôt les chiffres officiels comprennent, tantôt ils excluent les salariés agricoles employés dans les fermes d'Etat et les fermes auxiliaires et dans les stations de tracteurs et machines agricoles (lesquelles ont été récemment supprimées). Si l'on fait abstraction de ces ouvriers agricoles et si l'on tient compte des effectifs militaires, la statistique du salariat non agricole se présente comme suit : 9,9 millions de personnes en 1913, 10,5 en 1928, 20,7 en 1932 et 20,2 l'année suivante, 26 en 1937, 28,5 en 1939, 33,5 en 1940 (nouvelles frontières), 34,8 en 1948, 43,9 en 1952, 46,7 en 1954 et 48,3 en 1956. La durée annuelle moyenne du travail en dehors de l'agriculture peut être estimée pour 1913 à 2.850 heures par salarié, pour 1928 et 1948-1955 à 2.400, pour 1932 à 2.380, pour 1933-1939 à 2.050, pour 1940 à 2.225 et pour 1956 à 2.350. En multipliant ces chiffres par ceux du nombre d'ouvriers et d'employés, on obtient le résultat suivant, en milliards d'heures de travail non agricole : 28,2 en 1913, 25,2 en 1928, 49,3 en 1932, 41,5 en 1933, 53,4 en 1937, 58,5 en 1939, 74,6 en 1940, 83,5 en 1948, 105,5 en 1952, 112,6 en 1954, 113,6 en 1956. Mais on a besoin de connaître le nombre d'heures de travail accomplies par les kolkhoziens (soit au profit du kolkhoze, soit sur leurs propres lopins), par les ouvriers agricoles, les paysans indépendants, les artisans et lesmarchands, ainsi que les heures consacrées au jardinage par les ouvriers urbains et leurs familles. A ce propos, il faut recourir aux calculs de J asny et à diverses sources complémentaires, et procéder par extrapolation : 107,6 milliards d'heures de travail en 1913, 111,7 en 1928, 141 en 1932, 136 en 1933, 120,3 en 1937, 115,1 en 1939, 130,5 en 1940, 116,2 en 1948, 110,6 en 1952, 109,7 en 1954 et 116,2 en 1956. L'addition de ces chiffres fait ressortir la durée annuelle totale du travail. Référons-nous ici à la première et à la dernière année de la période considérée : en 1913, 139,3 millions d'individus ont accompli 135,8 milliards d'heures de travail, soit 975 heures par habitant; en 1956, 201,9 millions d'individus ont effectué 229,8 milliards d'heures de travail, soit 1. 139 heures par habitant. On voit que le fardeau imposé à la population s'est sensiblement accru entre 1913 et 1956. Produit par heure de travail SI L'ON DIVISE par la durée totale du travail le produit national il apparaît que le produit réel obtenu par heure de travail en 1913 valait 0,309 dollar et que ce chiffre fut un peu dépassé 15 ans plus tard, à la veille des plans quinquennaux : 0,317 dollar en 1928. Une baisse sensible , ,

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