Le Contrat Social - anno VI - n. 4 - lug.-ago. 1962

CH. BIRD dialectique marxiste. Cela est confirmé par une interview accordée récemment à un journaliste américain, Marvin L. Kalb, par le directeur de l'Institut, I. I. Potekhine : On croyait que l'Afrique n'avait pas d'histoire avant l'arrivée des impérialistes pour la seule raison que l'Afrique n'avait pas de langage écrit au sud du Sahara. On s'imaginait que l'Afrique était peuplée de sauvages primitifs, sanguinaires... Telle était l'image répandue par vos historiens bourgeois. Nous avons une autre façon de voir. Nous allons découvrir la vérité. Comme on demandait si cette vérité serait exposée en termes de marxisme-léninisme, il fut répondu : Il n'y a pas d'autre vérité (...) et je puis vous assurer que personne, dans cet Institut, n'en professe d'autre ... Il n'y a pas d'autre vérité, et c'est dans cet esprit que nous écrirons l'histoire de l'Afrique. Les faussaires ont fait leur temps. Leur rôle est terminé ; le moment est maintenant venu de la seule vérité 13 • Fièvre d'édition L'UNE des méthodes fondamentales employées par les jeunes Etats pour s'initier rapidement à la science et à la technologie est le cc saut-demouton »: en un court laps de temps il s'agit d'acquérir et d'assimiler une somme de connaissances ailleurs étalée sur une période beaucoup plus longue. C'est ainsi que les Soviétiques ont pu sauter plusieurs dizaines d'années dans un certain nombre de domaines ; ils essayent maintenant d'appliquer la même méthode sur le plan africain en réalisant un énorme programme de traductions. Dès 1941, ils publiaient en russe le manuel de W. Fitzgerald : Africa. A Social, Economie and Political Geography of its Major Regions. Plus tard, en traduisant des classiques tels que L'Afrique septentrionale et occidentale, du professeur A. Bernard, et L'Afrique équatoriale et australe, du professeur F. Maurette, ils procuraient à leurs spécialistes la documentation de base qui leur faisait défaut. Ce genre de travail s'est intensifié depuis quelques années. En 1959, par exemple, furent publiés en russe, de R. J. Harrison Church : West Africa. A Study of the Environment aud Man's Use of it, et de Robert Capot-Rey: Le Sahara français. Plusieurs ouvrages traitant de pays bien délimités furent également choisis pour être traduits. En 1958, on put lire en russe Le Maroc. Bilan d'une colonisation, de A. Ayche, paru en 1956, à Paris, ainsi que, de Charles Issawi, Egypt at Mid-Century, publié en anglais en 195414 • 13. The Reporter, 3 avril 1961, p. 37. 14. Il sera intéressant de voir si les Soviétiques incluront également à leur programme de traductions d'autres ouvrages fondamentaux : James Duffy : Portuguese Africa, James S. Coleman : Nigeria-Background to Nationalism, George Kimble : Tropical Africa, Thomas Hodgkin : Nationalism in Colonial Africa, Virginia Thompson et Richard Adloff : Prench We,t Africa, Gwendolyn Carter : The Politics of lnequality. Biblioteca Gino Bianco 205 Une série de publications occidentales purement techniques ont également été traduites. La maison d'édition de l'industrie soviétique des constructions navales a publié une édition russe de la partie se rapportant à l'Afrique de Ports of the World, un ouvrage publié en Angleterre et qui est un ami de longue date des marins. Qui doutait, en 1957, que des navires soviétiques mouilleraient bientôt dans les ports de l'Afrique tropicale aurait dû se demander quel besoin on avait de tirer à 4.000 exemplaires une traduction de ce manuel spécialisé. De même, le public soviétique peut lire des traductions toujours plus nombreuses de récits de voyages occidentaux. Ainsi, en 1957, Zwischen Rif und Draa, écrit en 1955 par le géographe allemand Horst Mensching, fut publié en russe, non sans des réserves formulées dans la préface : « L'auteur (...) s'abstient de tout commentaire critique à l'égard des colonialistes français et espagnols qui, à l'époque, faisaient encore la loi au Maroc. » Cette année, la vapeur sera renversée : les Soviétiques traduiront en anglais ce qu'ils tiennent pour leur ouvrage capital sur l'Afrique, première interprétation marxiste du sujet : N arody Afriki (Peuples d'Afrique), publié sous la direction de 1. 1. Potekhine et du professeur Olderogge. Cette traduction est assurément destinée à devenir un texte de base pour les centaines d'étudiants africains pratiquant l'anglais qui suivent des cours en Union soviétique et dans les autres pays communistes 15 • L'édition s'accroît également dans les domaines de la poésie, du roman et des ouvrages de vulgarisation. Les traductions russes d'écrivains et de poètes africains se multiplient et, depuis peu, des thèmes africains ont fait leur apparition dans le roman soviétique. On assiste à une véritable prolifération- de brochures traitant de diverses régions de l'Afrique. Dans le même ordre d'idées, il faut mentionner la littérature périodique spécialisée. D'un pointage des périodiques soviétiques reçus, en 1950, à la Bibliothèque du Congrès américain, il ressortait que moins de 100 articles sur l'Afrique avaient été publiés au cours de l'année dans 40 revues seulement. En 1956, quelque 400 articles étaient publiés dans 80 revues. En 1960, environ 140 revues triplaient presque le chiffre de 1956. Phénomène nouveau et significatif, dans la catégorie des revues académiques et professionnelles, ies articles consacrés à l'Afrique ne sont plus réservés à des publications spécialisées dans les sciences sociales et les relations internationales, mais paraissent à présent dans des revues de sciences naturelles et de technique : l'Economie agricole a publié un article sur l'agriculture tuni15. Quelque 1.500 étudiants originaires d•environ vingtcinq pays d, Afrique suivirent des coun dans le bloc sovi~- tique en 1960-61.

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